Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/420

Cette page n’a pas encore été corrigée

823

CROISADES

824

parvinrent sous Jean Comnène à imposer leur suzeraineté à Antioche (i iSy-i 144)-P"is la lointaine principauté d’Edesse succomba sous les coups des « atabeks » de Mossoul(i 144)- La prise d’Edesse excita la douleur en Europe, où saint Bernard prêcha la croisade. Le roi de France Louis VII et l’empereur Conrad IH conduisirent en Syrie une croisade, qui n’eut d’autre résultat que d’augmenter la haine entre les Grecs et les Occidentaux. L’expédition qu’ils tentèrent contre Damas échoua quillet 1 1 48), et ils purent seulement arrêter la marche envahissante de l’alabekNoureddin. Le roi de Jérusalem Amauri essaya de conquérir l’Egypte où l’autorité des califes fatimites n’existait plus. En 1 167, Amauri parvint à imposer un tribut à l’Egjpte, mais en 1168, iin général de Noureddin, Schirkouh, s’empara de l’Egypte et à sa mort (1 169) son neveu, Saladin, lui succéda et substitiia son pouvoir à celui des Fatimites. Bien plus, à la mort de Noureddin (i 174)) Saladin conquit Damas et la Mésopotamie, menaçant ainsi les Etats chrétiens de tous côtés. Sans s’inquiéter des intérêts du royaume, un puissant feudataire, Renaud de Chàtillon, seigneur de Montréal, rompit la trêve conclue avec le sultan, et en 1 182 enAOja dans la mer Rouge une audacieuse expédition qui menaça les villes saintes, la Mecque et Médine ; Saladin vint l’assiéger sans succès dans son château de Karak. Une deuxième fois, Renaud rompit la trêve qu’il venait de signer. Saladin exaspéré envahit la Palestine. Le 4 juillet 1187, l’armée chrétienne, conamandée par le roi Guy de Lusignan, fut écrasée par Saladin près du lac de ïibériade. Le 17 juillet, Saladin prenait Jérusalem ; bientôt les chrétiens ne possédèrent plus que Tyr, Antioche et Tripoli.

V. Tentatives de restauration des Etats chrétiens, xfi’^-xiii^ siècles. — A partir de 1187, l’histoire des croisades se compose des tentatives qui ont réussi à reconstituer momentanément les Etats chrétiens de Syrie. Mais l’autorité des papes dans la chrétienté était battue en brèche par les empereurs germaniques ; l’enthousiasme religieux avait diminué. Les villes italiennes, dont les navires étaient indispensables, ne songeaient c]u’à l’exploitation commerciale de l’Orient. Enfin, plusieurs souverains essayèrent de se servir delà croisade pour s’emparer de la domination de l’Orient. La croisade qui suivit la prise de Jérusalem eut encore le cai’actère d’une expédition européenne. Les plus puissants soiiverains y prirent part. L’armée de Frédéric Barberousse se dispersa après sa mort (il se noya dans le Selef). Philippe- Auguste, roi de France, et Richard Cœur-de-Lion, roi d’Angleterre, tinrent prendre part aux opérations de l’armée chrétienne contre Saint-Jean-d’Acre, qui capitula après un siège de deux ans (13 juillet 1191). Le caractère brouillon de Richard, qui resta en Palestine après le départ de Philippe, fit échouer la marche sur Jérusalem. Par contre, une nouvelle colonie chrétienne se fondait à Chypre, enlevée par Richard à un dynaste byzantin. Organisée sur le modèle du royaume de Jérusalem, peuplée de chevaliers français, elle allait devenir un point d’appui pour les croisades. L’empereur Henri VI, lils de Barl)erousse, préparait une expédition qui devait conquérir Constantinople et la Terre Sainte, quand il mourut à Bari (septembre 1198). L’avant-garde qu’il avait euA’oyée en Palestine revint en Europe, mais la création des Chevaliers Teutoniques, organisés en i ig8 sur le modèle des Hospitaliers, introduisit l’inlluence allemande en Palestine. La croisade de Constantinople (1203-1204) montre la première déviation importante de l’idée de la croisade. Les croisés qui, à la Aoix d’Innocent III, se rassemblèrent à Venise, se laissèrent circonvenir par le gouvernement Aénitien et aussi par

les intrigues de Philippe de Souabe, beau-frère du i prétendant byzantin, qu’ils allèrent rétablir sur le ^ trône de Constantinople. Une fois restauré, Alexis ne put tenir les promesses qu’il avait faites aux barons. Les croisés assiégèrent de nouveau Constantinople, la prirent d’assaut (12 avril 1204). la livrèrent au pillage et proclamèrent empereur l’un d’entre eux, le comte de Flandre, Baudouin. Innocent Illci-ut d’abord qu’il pourrait faire sei’vir à la croisade les forces du nouvel empire latin. Il comprit bientôt qu’il ne serait pour la chrétienté qu’une source nouvelle d’embarras, et ne songea plus qu’à organiser une nouvelle croisade. L’enthousiasme mj stique pour la Terre Sainte se manifesta encore dans l’épisode si étrange de la croisade d’enfants (1212). La croisade, proclamée au concile de Latran (121 5), fut conduite d’abord par le roi André de Hongrie (1217), puis en 12 j 8 le roi de Jérusalem Jean de Brienne à la tête de toutes les forces chrétiennes, attaqua l’Egypte et assiégea Damiette qu’il prit d’assaut (5 novembre 1219). Mais l’armée chrétienne, peu disciplinée, fut arrêtée dans sa marche sur le Caire par les Sarrasins et dut restituer sa conquête. L’empereur Frédéric II, qui avait pris la croix en 12 15, différait sans cesse l’accomplissement de son vœu. Excommunié par le pape, il partit enfln en 1228, mais ce fut pour conclure avec le Soudan d’Egypte une convention diplomatique qui lui livra Jérusalem (1229). Marié à Isabelle de Brienne, il prit la couronne royale au Saint Sépulcre sans aucune cérémonie religieuse, et chercha à imposer son autorité aux barons de Terre Sainte. Le véritable esprit de la croisade ne se manifeste au xiii’siècle que chez le roi S. Louis. Lorsqu’en 1244 Jérusalem eut été reprise par une bande d’aventuriers Kharizmiens qui fuyaient devant l’invasion mongole, seul parmi les souverains S, Louis prit la croix. Son expédition en Egypte échoua (i 248-1 250), malgré la prise de Damiette, qu’il dut rendre pour payer sa rançon après avoir été fait prisonnier à la Mansourah. Il ne put que profiter de son séjour en Palestine pour délivrer les prisonniers et mettre les places fortes en état de défense. Mais les discordes entre les chrétiens, et surtout la longue guerre qui commença entre Gênes et Venise, interdisaient tout espoir de relèvement. En 1261 les Grecs reprirent Constantinople et mirent lin à l’empire latin. Un aventurier mamlouk devenu maître de l’Egypte, le sultan Bibars, repoussa les Mongols qui menaçaient de faire cause commune aA-ec les chrétiens, et prit une à une toutes les places de Palestine ; en 1268, il emporta Antioche. En Occident le frère de S. Louis, Charles d’Anjou, devenu roi des Deux-Siciles, ne songeait qu’à conquérir Constantinople. S. Louis lui-même prit la croix en 1267, mais ce fut pour aller mourir de la peste devant Tunis (26 août 1270). Une nouvelle tentative des Mongols sur la Palestine fut repoussée par les Egyptiens (bataille de Hims, 1 280). La révolte des Vêpres siciliennes força Charles d’Anjou à abandonner ses projets sur l’Orient. Kelaoun, successeur de Bibars, avait désormais le champ libre. En 1289 il prit Tripoli. En 1291 son fils, Malek-Aschraf assiégea Saint-Jean-d’Acre et s’en empara après un siège de 53 jours. La domination chrétienne avait disparu de la Syrie ; le résultat de l’immense effortfaitauxiu » siècle était anéanti. Les chrétiens ne gardaient plus en Oi-ient que l’île de Chypre, la Petite- Arménie et quelcjnes principautés de l’empire latin.

VI. La croisade aux XI’V'-X’V" siècles. — Malgré cette catastrophe, les i^rinces d’Occident ne bougèrent pas, et il n’y eut plus de croisade générale. Au lieu d’agir, on écrivit beaucoup, et des théoriciens, comme l’avocat Pierre Dubois (De recuperatione Terrae