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CORPUS JUKI S CANONICI

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de Gratien : les mots Dicta Graîiani, répétés en tête du commentaire, le distinguent des citations. Quelques canons portent le titre de Paleæ ; ce sont des textes insérés postérieurement à Gratien par des commentateurs : on pense plus généralement que ces additions ont été ainsi appelées du nom de leur premier auteur Paucapalea ou Pucapaglia, disciple de Gratien. Cependant cf. Gilmanx, Paucapalea und Paleæ hei Huguccio (Mayence 1908), et dans Archiv ftir Kat. Kirchenrecht, t. LXXXVIII.

2° Description du Décret. — Le Décret est di^-isé en trois parties. La première etla troisième (intitulée De consecratione) sont subdivisées en distinctions sectionnées elles-mêmes en canons ou chapitres ; la deuxième est distribuée en causes (en tête desquelles Gratien propose le sujet sous forme de cas ou espèces juridiques) et qui se subdivisent en questions, puis en canons. L’une de ces questions, la 3’de la XXXIII"^ cause, est tout un traité de la Pénitence, que Gratien a inséré dans sa collection et que sa longueiu- a fait partager en distinctions et canons, lue compilateur a placé en tête de chaque canon un sommaire qui le résume et une inscription qui indique, souvent d’une manière fautive, son origine. _

On trouvera, dans les manuels de droit canonique, la manière de citer le Décret et les autres collections du Corpus : voir notamment, sur les usages des anciens autem-s, Laurin (ci-dessous, à la Bibliographie).

Les commentateurs du décret y ajoutèrent, en marge ou en interligne, des gloses ou courtes annotations à certains mots du texte. Vers I213, Jean le Teutonique en fit un choix qu’il retoucha et compléta ; revisées en 12^5 ou 1246, par Barthélemi de Brescia, ces notes devinrent usuelles sous le nom de glose ordinaire. On joignit à la glose des cas ou exemples, des divisions, des références aux textes correspondants, etc. ; et ainsi fut formé l’apparat marginal cpi’on trouve dans les éditions glossées. Ce qui eut lieu pour le Décret de Gratien, se réalisa aussi pour l’appai-at des autres collections. Leurs auteurs y sont souvent indiqués par de simples abréviations : on trouvera la clef de ces initiales dans l’ouvrage de Laurin cité ci-dessous à la Bibliographie.

3’^ Valeur du Décret. — Le décret jouit, dès le début, d’une grande vogue ; du reste, aucun doute n’existait alors sur l’authenticité de ses éléments : il devint bientôt le texte de l’enseignement classique ; il fut reçu dans les tribunaux et cité dans les documents législatifs de l’Eglise : elle en donna même au xvie siècle une édition dans un certain sens otlicielle (v. ci-dessous les Editions du « Corpus juris »). Malgré cela, et contrairement à ce qu’en ont pensé quelques canonistes, le Décret ne fut qu’une œuvre privée, qui n’a jamais été authenticjuce officiellement : on 1 allègue au for ecclésiastique à peu près comme on allègue, par exemple, au for civil, la collection de Dalloz. Il s’ensuit que pour se rendre compte de la valeur historique et juridique de chacun de ses canons, il est nécessaire de s’informer de leur valeur originelle. Gratien n’a pas consulté le plus souvent les sources primitives ; mais il a travaillé sur les collections antérieures, où circulaient depuis le ix"" siècle bien des pièces apocryphes. Il lui arrive d’attribuer, dans ses inscriptions, à des papes ou à des conciles généraux des textes apocryphes ou empruntés aux synodes locaux, aux Pères de l’Eglise, aux lois civiles, et de donner la valeur de lois canoniques universelles et générales à des citations qui n’ont aucune autorité législative ou à des canons, légitimes sans doute, mais qui ne constituaient que des prescriptions particulières et restreintes. Il y aura donc lieu de faire la critique des autorités du Décret avant de les utiliser. Nombre d’éruditsont travaillé à cette rccen sion, et notamment Antoine Augustin (-J- 1586) dans ses De emendatione Gratiani dialogorum libri duo (Tarragone, 1687) et Sébastien Berardi (-f- 1766) dans ses Gratiani canones genuini ab apocryphis discreti (Turin, 1752-1757). Mais une des éditions les plus utiles à cet égard est celle d’Emile Friedberg (v. ci-dessous Editions du « Corpus juris) » : on y trouvera, indiquée, dans les prolégomènes et dans les notes, l’origine vraie des divers canons.

III. Décrétales de Grégoire IX. — 1° Origine de la collection. Après Gratien, d’autres collections furent publiées, et cinq d’entre elles, dites les cinq compilations antiques, eurent une notoriété particulière : la troisiè me même et la cinquième (probablement aussi la quatrième) constituèrent des collections officielles. Cf..^.Friedberg, Quinque compilationes antiquae (Leipzig, 1882). Mais, dans la première moitié du xiii siècle, tous ces recueils furent remplacés par la célèbre compilation de Grégoire IX. Le pape en confia la préparation à saint Raymond de Pennafort (-J- 1275). Il le chargea de faire non un simple classement des lois existantes, mais aussi une retouche de tout le droit, en vue d’en éclaircir les incertitudes, d en concilier les antinomies, d’en combler les lacunes et d’en mieux ordonner le texte. Son œuvre fut sanctionnée par l’autorité apostolique, et Grégoire IX la promulgua, pour toute l’Eglise, comme collection officielle du droit canonique universel, par sa constitution Rex paci ficus (3 septembre 1234) : aux termes de cette constitution, l’usage exclusif du nouveau code était prescrit pour l’enseignement et l’administration de la justice. On le trouve désigné, dans les anciens auteurs, sous le nom de Compilatio sexta, par opposition aux Cinq compilations antiques (ne pas confondre avec le Liber sextus de Boniface Vlll dont il sera question ci-dessous), ou encore Liber extravagantium, livre des décrétales non contenues dans Gratien, extra Decretumyagantium(ne pas confondre avec les deux collections des Extravagantes dont il sera traité tout à l’heure) ou enfin Décrétales tout court et Décrétales Gregorii.’i.’^ Description de la collection. — S.Raymond divisa lui-même la collection en cinq livres, subdivisés en titres et chapitres. Les titres sont numérotés et formulés par de courts libellés, qu’on imprima d’ordinaire en rouge, d où leur nom usuel de rubriques. Bien que saint Raymond eût modifié le texte primitif des canons, il laissa en tête des chapitres les inscriptions (souvent fautives) qui en indiquaient l’origine ; et il marqua fréquemment par les mots Et infra (ou Et y.) les endroits où il avait opéré des coupures plus considérables. Ces passages omis à dessein par le législateur, ou partes decisae, ont été rétablis par les éditeurs, depuis le xvi’siècle, ou en notes, ou, ce qui est moins conforme aux prescriptions canoniques (v. ci-dessous, édition romaine de Grégoire XIII), dans le texte lui-même. Les éditeurs ajoutèrent aussi, depuis la fin du xv’siècle, en tête des chapitres, de brefs sommaires, empruntés aux commentateurs les plus célèbres. Les décrétales eurent leurs glossateurs. Dans la première partie du xiii® siècle, Bernard de Botone ou Parmensis (]- 1203), avec les gloses de ses prédécesseurs et les siennes propres, composa la glose ordinaire qui devint d’un usage commun et que complétèrent les additions de Jean André (Addit. Joa. Andr.).

3° Valeur des Décrétales de Grégoire IX. — La collection est officielle. Il y a donc lieu de distinguer la valeur critique des documents considérés en eux-mêmes et la valeur juridique qu’ils reçoivent du fait de leur insertion dans une collection officielle. — 1° Valeur critique. La collection ne renferme qu’un nombre