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CONCILES

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même temps qu'à toutes les autres mesures, très nombreuses et très variées, adoptées dans la ve session :

« Quibus articulis sive constitutionibus lectis, dictum

concilium eos et eas iiniformiter approbavit et conchisit. » En résumé, on voit si nous avions sujet de contester la valeur des décrets de Constance comme affirmation autorisée de la supériorité des conciles sur les papes. Cf. Salembier, Le grand schisme d’Occident, p. 315 suiv. ; Baudrillart, art. Constance, dans le Dictionnaire de théol. cath. de Vacant-Mange not.

2) Mais on a prétendu trouver dans l’histoire même des conciles certainement œcuméniques une preuve de leur supériorité sur les papes. N’en a-t-on pas vu plusieurs s’arroger le droit d’examen, de contrôle, sur des décisions fermes émanant des pontifes romains ? Ils les considéraient donc comme subordonnées à leur ratiGcation.

A cela nous répondons qu’autre chose est un examen dubitatif, entrepris comme moyen nécessaire d’arriver à une conclusion précise et certaine, autre chose un examen simplement confirmatif, qui, la valeur d’un acte supposé, tend à en approfondir les conditions, les raisons ouïes preuves, pour les mettre mieux en lumière et leur donner, aux yeux de tous, plus d'éclat, plus de force persuasive. C’est le second seul qu’on rencontre dans les délibérations conciliaires relatives à des déGnitions pontificales. Il en va ici des conciles par rapport aux papes comme il en va d’un concile œcuménique jtar rapport à un concile œcuménique antérieur, quand un point défini par celui-ci est réadmis en discussion et défini à nouveau par celui-là. Ainsi la vérité du Filioque et la primauté suprême et universelle du pontife romain avaient été définies, puis publiquement professées par les Grecs, au II' concile de Lyon (Denzing-er-Bannwart, Enchiridion, ïi° 461, suiv.), et l’examen de ces deux articles fut cependant repris au concile de Florence pour aboutir à une nouvelle définition de l’un et de l’autre (Denzinger-Bannw., ibid., no 691). De même, le dogme de la transsubstantiation, défini au IV^ concile de Latran (op. cit., n° 430), fut encore une fois discuté et défini dans la xiii session du concile de Trente. Dirat-on que, dans ces deux cas, le concile qui revient sur un objet déjà traité et déterminé par un précédent concile, l’estime encore douteux ou se croit lui-même supérieur à ses devanciers ? La distinction indiquée et que suppose cette pratique n’est ni fantaisiste ni inventée pour les besoins de la cause. 'Saint Léon l’avait certainement présente à l’esprit lorsque, communiquant au concile de Chalcédoine une sentence irréformable de condamnation contre Eutychès, il inculquait à la fois et le devoir inconditionnel de soumission des évêques et leur droit de ne se prononcer qu’en connaissance de cause, d’examiner et de juger. Quant au premier, qu’on relise l’extrait de sa lettre aux Pères du concile, que nous avons cité ci-dessus (col. 60)). Quant au second, il l’ailirmait tout aussi nettement, en écrivant à Thcodoret (P. L., t. LIV, col. io48) : « La vérité elle-même brille d’un plus pur éclat et se grave plus profondément quand cet examen (épiscopal) vient ensuite confirmer ce que la foi avait enseigné d’abord. En résumé, la dignité du ministère sacerdotal resplendit vivement chaque fois que l’autorité des supérieurs est respectée de telle façon que la liberté des inférieurs n’en souffre aucun détriment. >> 7° Le dernier concile œcuménique, celui du Vatican, a été l’objet ou l’occasion de nombreuses allatpies. Plusieurs, celle, par exemple, qui mettait en doute ou niait la liberté de ses membres, ont été touchées au cours de nos précédentes explications. Je n’n relèverai plus que deux. On a prétendu que désormais, grâce au dogme de l’infaillibilité pontificale, les

conciles ont perdu leur importance et leur autorité traditionnelles, qu'à l’avenir ils « ne seront que des parlements convoqués en lit de justice pour enregistrer les volontés du souverain », que les Pères enfin n’y seront plus des juges, qualité que Rome tendait du reste depuis longtemps à leur enlever, comme le montre le changement de la formule des définitions dogmatiques : jadis, le concile tout entier définissait ; aujourd’hui, c’est le pape qui définit sacro approbante concilio. On ajoute que la proclamation du nouveau dogme est la « suppression virtuelle » des conciles provinciaux et nationaux.

Un mot d’abord du second point. Aussi bien, la réponse, ici, est facile ; des faits récents nous la fournissent. En annonçant la disparition ou quasi-disparition et l’effacement des conciles provinciaux et nationaux, on suppose, naturellement, bien plus on indique que ceci aussi est dans les vœux des souverains pontifes. Or, nous avons vu comment, au siècle passé, Pie IX et Léon XIII ont favorisé par tous les moyens la réunion de ces conciles dans divers pays de l’Europe et jusqu’en Orient, comment, en particulier, ils se sont appliqués à en réintroduire l’usage là où il avait été trop négligé et presque oublié. Le concile du Vatican et ses actes n’ont rien changé à ces dispositions bienveillantes et encourageantes du Saint-Siège ; témoin, entre autres, le concile plénier d’Irlande, en 1876 ; le concile plénier tenu à Baltimore en 1884, qui a été l’un des plus remarquables et des plus féconds de l'époque moderne, et les deux conciles pléniers d’Australie, en 1885 et 1896. Du reste, comment admettre des suites nuisibles pour les conciles particuliers, lorsqu’il n’y en a point pour ceux dont le pouvoir et l’action ont directement le même objet que le pouvoir etl’action des papes, je veux dire les conciles œcuméniques ?

Quant à ceux-ci donc, il est faux que le dogme de l’infaillibilité pontificale doive les diminuer, les réduire au rôle de simples assemblées consultatives. Sans doute, dans certains cas la nécessité relative d’un concile pour supprimer efficacement une erreur ou mettre fin à une controverse regrettable pourra se faire moins vivement sentir, par là même que tous les catholiques sont plus fermement persuadés de la plénitude du pouvoir, qui est dans le pape égale à ce qu’elle est dans un concile. Mais celui-ci une fois réuni, on ne voit point pourqvioi sa nature serait modifiée par la prérogative, non pas nouvelle ni nouvellement crue, mais solennellement définie, de l’infaillibilité du pape. Dans le concile, tout le monde en convient, l’autorité suprême est exercée conjointement par tous les membres. Les évêques conciliairement assemblés constituent autant de juges, de législateurs et de définisseurs. Cette qualité, qu’exprime bien la formule traditionnelle, encore en usage : Ego N. N. definiens subscripsi, loin d'être mise en péril au concile du Vatican, y a été expressément reconnue ; elle est attestée notamment par ces paroles de la constitution dogmatique />e//'7/n/s ; Sedentihus nobiscum et judicantibas unis-ersi orbis episcopis, surtout lorsqu’on les rapproche du commentaire officiel contenu dans les discussions conciliaires. Contre des déclarations si explicites, que valent les insinuations qu’on feint de découvrir dans ces trois mots : Sacro approbante concilio ? Du reste, est-il besoin de remarquer que le changement de formule n’est pas le fait du concile du Vatican et qu’il remonte au ! > concile de Lyon (1245)? Mais il y a plus, les évêques ne cesseraient pas d'être juges et d’agir comme tels, lors même qu’ils se trouveraient en présence d’une question déjà tranchée définitivement par le pontife infaillible : ils seraient alors dans la situation de tout juge et de tout tribunal, qui font véritablement acte d’autorité