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CHINE

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dévot bouddhiste. Sous l’empereur Wen, en 835, persécution sanglante des Lettrés par les eunuques, à peu près comme en 170. — En 843, les Ouïgours étant ruinés, un édit de l’empereur Ou supprime le Manichéisme. Devenu fervent taoïste, le même empereur porta en 845 contre les Bouddhistes un édit d’extermination, dans lequel furent englobés le Nestorianisme et le Mazdéisme. Plus de 44-ooo pagodes et bonzeries furent détruites, plus de 260.000 bonzes et bonzesses furent sécularisés. Moins d’un an après, l’empereur mourut d’une dose de drogue d’immortalité, et son successeur l’empereur Siuen s’empressa de faire oublier aux Bouddhistes leurs malheurs. En 852, le même se convertit au Taoïsme. En 809 il mourut aussi d’une dose de drogue d’immortalité. Puis l’empereur I fut Bouddhiste fervent. — Sous l’empereur Hi, en 879, au sac de Canton, 120.000 Musulmans. Juifs, Nestoriens et Parsis furent passés au fil de l’épée. — Vers 882, sentant que leur cvilte manquait de tête, les Taoïstes abandonnèrent le Suprême Un, monopolisé par le gouvernement, et inventèrent le Pur Auguste, déité qui deviendra très populaire.

— Les T’angs’étant écroulés en 907, et les hordes du Nord, Tongouses et Turcs, s’étant de nouveau ruées sur l’empire, un calme relatif se fit dans les esprits durant 54 ans. Chose singulière, en 982 le Turc Liseyuen fit éditer pour la première fois par la gravure les classiques confucianistes, copiés à la main jusque là. Personne n’a contribué au relèvement du Confucianisme plus que cet étranger.

X. Sous les Song. Taoïsme héroïque. Néo-confucianisme. — Cette période s’étend de 960 à 1280. Constatons d’abord l’établissement à la capitale K’aifong-fou, on ne sait pas en quelle année, d’une colonie deJuifs noirs, indiens ou persans. — Les Chinois avaient donné aux Japonais le Bouddhisme et le Confucianisme ; le Japon rendit à la Chine. En 984, le bonze japonais Tiao-jan présenta à l’empereur T’ai l’histoire du Japon, et lui exposa le Sintoïsme japonais, ensemble de fablesqui fait descendre lafamille impériale et les familles nobles de héros anciens divinisés. [Ce fut une révélation. L’empereur admira beaucoup, dit l’histoire, et conçut une forte envie de n’être pas moins divin que son collègue japonais. Depuis lors il fit de grandes avances aux Taoïstes, mais n’eut pas le temps d’aboutir. C’est son fils l’empereur Tchen, qui créa le Sintoïsme chinois. Cet homme fut un imposteur consommé. Il trouva, pour l’aider, des ministres de même acabit. En 1008, il commença à avoir des apparitions. Un écrit mystérieux tomI)a du ciel. D’autres visions et faveurs suivirent. Elles furent attribuées au Pur Auguste, iin-enté par les Taoïstes en 882. On insinua que ce Pur Auguste était l’ancêtre de la famille impériale. Par suite, en 1017, un décret lui attribua les insignes impériaux. Lao-tse abaissé reçut une place intermédiaire entre le Pur Auguste et l’empereur. Une foule d’anciens personnages, bons et mauvais, furent faits Génies courtisans du Pur Auguste. Tandis que l’élysée taoïste se peuplait, sur la terre le Taoïsme se hiérarchisait définitivement sous la direction d’un descendant de Tchang-tao-ling, et ce Sintoïsme chinois devenait religion de l’Etat. Jamais les Lettrés ne ricanèrent comme devant ces folies ; mais ce fut en vain : la choseeuldu succès. L’empereiu- Iloiay mit ladcrnière main, p’n 1115, il concilia, par <lécrcl, le cidte nouveau avec la religion anli(jue, en déclarant que le Pur Auguste n’était autre qtu> le Sublime Souverain. Il vulgarisa le binôme, en faisant représenter le ciel sous la figure d’un homme, et la terre sous celle d’une femme. La coin- inq)ériale devint une féerie. Le géomancie, forme de divination noxivellc, décida

de tout. Restaient les Bouddhistes réfractaires au mouvement. En 1115 l’empereur tenta de les faire entrer en bloc, par décret, dans son système. Bouddha et ses disciples furent incorporés dans la légion des Génies taoïstes, chacun à son rang. Ordre aux bonzes de se fondre avec les tao-che. On espérait que la fusion des adeptes suivrait celle des déités et des maîtres. Il n’en fut rien. Les Bouddhistes patientèrent en attendant le revirement, lequel vint à son heure. Les incursions des Tongouses Kin, puis des Mongols de Gengis-Khan, donnèrent bientôt aux Song de telles distractions, qu’ils en oublièrent la théosophie. Une philosophie, le Néo-confucianisme, occupa les courts répits de leur longue agonie. — Nous avons vu que, dès le temps des Ilan, les Lettrés avaient déjà altéré considérablement les vieilles notions frustes, legs de Confucius et des anciens. Leurs successeurs continuèrent. A partir du x’siècle, la diffusion par la gravure des livres confucianistes, bouddhistes et autres, leur permit de lire davantage et de mieux comparer. La Tripitaka chinoise leur révéla les systèmes des écoles philosophiques de l’Inde. Le désir d’une systématisation des doctrines confucianistes naquit dans bien des esprits, et plusieurs se mirent à l’œuvre. Leur action détermina une réaction. Les confucianistes se divisèrent en deux camps, les réactionnaires et les progressistes, qui se firent, au xii* siècle, une guerre acharnée. Les réactionnaires demandaient le retour pur et simple au texte ancien, et l’abandon de tous les commentaires, même de ceux consignés dans l’édition des classiques de l’an 687, comme étant déjà entachés d’hétérodoxie. Les progressistes, imbus de philosophie indienne, étaient au contraire pour qu’on ajoutât des commentaires nou-Acaux, dans lesquels on systématiserait les propositions éparses du texte intangible, et les gloses des commentateurs anciens. Quelques-uns de ces progressistes sont à connaître. Au xi’siècle, Chao-yong,

TCHEOU-TŒN-I, TCHANG-TSAI, IcS dcUX frèrCS T’CHENG HAO et T’cHKNG-i, Se-ma-koaxg. Au XII* siècle, Tchou-Hi qui les résuma, et qui enchérit siu- tous. La lutte s’envenima à l’extrême. Tour à tour les deux partis en appelèrent à l’autorité impériale, au bras séculier, La politique ayant incliné les empereurs vers les réactionnaires, ceux-ci usèrent de leur faveur pour éci-aser leurs adversaires. En 1)78. ils obtinrent de l’empereur Hiao la condamnation des commentaires nouveaux de T’cheng-i. Le verdict porte : « Abandonnant le texte des Classiques, les Lettrés ne s’occupent plus que de philosophie abstraite, et passent leur temps à combattre, à coups d’expressions inintelligibles, des idées insaisissables. Qu’il leur suflise d’apprendre l’interprétation traditionnelle, et de se bien conduire ! » Tchou-hi et ses amis ayant appelé leur parti YEcole de la Voie, les réactionnaires se jugèrent par là qualifiés implicitement de dévoyés. Poiu- se venger, ils sollicitèrent et obtinrent un décret impérial, qui appela le parti de Tchou-hi Ecole de mensonge. Le maître fut persécuté ; ses disciples furent traités de clique perverse. Tchou-hi avait, comme Confucius, un caractère hargneux, qui servait mal sa cause, d’ailleurs mauvaise. Ses discours, prolixes ou violents, endormaient ou exaspéraient ses auditeurs. Le gouvernenient le fit surveiller de près. Il mourut, gardé jusque sur son lit de mort, en 1200, à l’âge de 71 ans. La vogue lui vint après s.a mort, comme à Confucius. Au moment où les Song allaient tomber du trône, l’empereur Li s’enticha des élucubrations de Tchou-hi. le nomma en 124 I Grand maître, le diplôma exégète authentique, classique idéal, plaça les tablettes des cinq principaux progressistes dans le temple de Confucius. C’était, en périssant, léguer à la Chine la peste. Les