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CATACOMBES

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III. Description des catacombes. — Les catacombes romaines, c’est-à-dire les cimetières souterrains établis pour la sépulture des clirétiens de Rome, s’étendent dans un rayon de trois milles autour de la ville éternelle. Quelques-unes se trouvent en communication avec des arénaires ou sablonnières ; de rares régions de catacoml)es sont même des arénaires appropriés non sans difficulté à un usage sépulcral ; mais la plus grande partie, on peut dire la presque totalité des cimetières souterrains s’en distinguent par les caractères les plus tranchés. Les sablonnières étendent leurs chemins larges et irréguliers dans les couches fragiles de pouzzolane : les catacombes sont ordinairement creusées dans le tuf granulaire, moins dur que la pierre, plus consistant que le sable, et facile à façonner en galeries et en chambres. Il est à peine besoin de dire qu’aucune communication n’existe soit entre les diverses catacombes, soit entre les catacombes et la ville de Rome : elles sont ci’eusées en général dans les ten-ains élevés, au-dessus du niveau des eaux : les fréquentes ondulations de la campagne romaine, les rivières ou ruisseaux qui la traversent auraient rendu impossibles de telles communications, quand même on aurait eu l’inutile et coûteuse fantaisie de les tenter.

Ce que nous avons dit de l’origine historique des catacombes fait comprendre qu’elles s’étendaient sous des terrains soigneusement délimités, comme toute concession funéraire régulière et légale. Il suffit, pour s’en rendre compte, de regarder la carte du cimetière de Calliste, dressée par de Rossi. Dans le dernier état de son développement, ce cimetière absorbait divers centres d’excavation primitifs, qui lui furent incorporés l’un après l’autre ; mais chacun d’eux avait formé, à l’origine, un quadrilatère distinct, dont les galeries anciennes respectaient et contournaient soigneusement les limites. Même à l’époque où des donations successives lui eurent donné sa plus grande extension, il ne s’agrandit pas indéûniment : quand il eut atteint, au nord, le cimetière voisin de Balbine, il n’en franchit point les frontières : les deux cimetières restèrent matériellement et administrativement séparés, et leurs galeries extrêmes se touchent sans communiquer.

On se demandera comment les fossores purent observer si exactement sous terre les limites des concessions légales. Ils employèrent probablement la méthode des arpenteurs ou agrimensores romains. On traçait, ordinairement du nord au sud, une ligne droite, le decuinaniis. Une autre ligne, le cardo, tirée de l’est à l’ouest, la coupait à angle droit. Ces lignes pouvaient, au besoin, être répétées, et constituaient alors une série de parallèles, leur mesure étant conforme à l’étendue de la concession en largeur et en longueur, in fronte et in agro ; les dimensions de toute l’area s’en déduisaient sans difficulté. L’examen, sur le plan du cimetière de Calliste, des diverses areæ originaires montre que les premières excavations durent être faites d’après cette méthode. Cela est surtout évident pour les quatre carrés du cimetière de Sainte-Solère, formé par l’intersection de deux longues galeries jouant le rôle du decumanus et du cardo : chaque carré a ensuite son système particulier, au moyen de galeries secondaires tp^ii le subdivisent parallèlement aux deux ambulacres piùncipaux. Dans l’excavation des areæ régulières, le travail des fossores était donc beaucoup moins compliqué et moins difficile qu’on ne le croirait à première vue. Là où la difficulté semble plus grande, c’est dans l’établissement de ces régions accessoires, réseau de galeries en apparence inextricable, qui, généralement après la paix de l’Eglise, furent créées pour unir les diverses parties distinctes d’un même

cimetière. Mais alors les luminaires furent multipliés, et le jour qui tombait d’en havit guidait les ouvriers dans leur lal)eur souterrain : le son de la roche frappée par l’outil avertissait d’ailleurs leur oreille exercée et leur permettait d’éviter les rencontres fortuites entre les galeries.

L’office des fossores attachés aux catacombes consistait d’abord dans l’excavation des galeries et des chambres. Plusieurs fresques les montrent attaquant avec le pic la surface du sol, ou façonnant dans ces profondeurs les corridors souterrains. De Rossi a calculé que deux terrassiers, l’un taillant la roche, lautre transportant les décombres, pouvaient faire chaque jour au moins deux mètres de galerie, et préparer les murailles pour huit ou dix niches sépulcrales. Une inscription laissée par un fossor dans le cimetière de Calliste nous apprend qu’il y avait creusé une chambre en dix jours. Les fossores remplissaient encore une autre charge : ils ouvraient les tombes, y déposaient les morts, fermaient la sépulture ; parmi eux étaient sans doute des scribes ou des graveurs, qui traçaient avec le pinceau ou le ciseau l’inscription funéraire. Le caractère religieux de ces soins rendus aux défunts explique que les fossores aient été, au moins depuis la fin du iii*^ siècle, agrégés au clergé, dont ils formaient un ordre inférieur. Un corps de fossores était vraisemblablement attaché à l’administration de chaque cimetière. Les services de ces <( travailleurs » (labor unies,

« TîtoSvTs ; , MTciâ.x’y.t.), comme on les appelait aussi, différaient

essentiellement de ceux des mercenaires ; ils étaient, de même que les autres clercs, entretenus par l’Eglise. Plus tard seulement, quand les sépultures dans les catacombes furent devenues rares, ils reçurent ou s’attribuèrent la faculté de les concéder à leur profit ; mais ce fut, comme nous l’avons dit plus haut, le principe de leur décadence, et probablement une des causes de leur suppression.

Les catacombes ont plusieurs étages souterrains, toujours construits sur un plan horizontal, par conséquent distincts les uns des autres ; ils ne communiquent point par des chemins s’abaissant en pente douce, mais par des escaliers. Ces étages sont percés de galeries ayant généralement de o m.’jo à i m. 55 de largeur, et varient en hauteur selon la nature du sol. Les parois contiennent des niches superposées, destinées à recevoir un ou plusieurs corps. De place en place cette suite de niches est coupée par une porte (jui donne accès dans une chambre.

Ces chamljres (ciibicidum) sont plus ou moins multipliées selon les cimetières et aussi selon les époques. Aux temps les plus anciens appartiennent les chambres petites, carrées, destinées seulement à la sépulture ou à de rares assemblées le jour anniversaire d’un martyr ou d’un simple défunt ; on doit faire descendre à la dernière moitié du m siècle, où les réunions liturgiques devinrent plus difficiles dans les églises élevées à la surface du sol, la construction de chambres souterraines plus spécialement destinées à ce but, doubles, triples, quadruples, éclairées par de grands luminaires, quelquefois construites en forme de polygone ou de rotonde, ou même constituant de vraies basiliques souterraines avec vestibules, salles distinctes pour les hommes et les femmes, tribune, chaires taillées dans le roc, banc presbytéral autour de l’abside.

Quand les hypogées primitifs autour desquels se développèrent les catacombes n’étaient encore que des tombeaux de famille, les fidèles y furent surtout déiJosés dans des sarcophages, mis à plat sur le sol ou abrités par des niches. On retrouve ce mode de sépulture dans le large corridor qui forme la plus ancienne partie de la catacombe de Domitille. La pre-