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CATACOMBES

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cuhile, et pense que ctimha avait été formé de cithare, avec intercalation de m ; dans cette liypotlïèse, cata (fréquemment employé pour /y-v. dans la basse latinité ) cHTO^as équivaudrait à crt/fl accithitoria eiawYaxi le sens de ad coemeteria. Le nondjre et l’importance des cimetières chrétiens en cette région de la voie Appienne lui auraient fait donner ce nom, accepté même des païens, car le cirque construit par Maxence près de Saint-Sébastien s’appelait c/rcz/s ad cataciimhas. Peu à peu, cette expression locale se généralisa et devint, dans la langue vulgaire, l’appellation commune de tous les cimetières chrétiens. On la trouve pour la première fois employée avec ce sens par Jean Diacre, an ix^ siècle.

II. Histoire des catacombes. — I/histoire des catacombes se divise en plusieurs périodes.

Pendant la première, les cimetières chrétiens restèrent des propriétés privées.

On connaît l’horreur des anciens pour la promiscuité des sépultures. A l’exception des plus misérables parmi les esclaves, enterrés dans les fosses communes ou puticnli^ les Romains de toute condition s’efforçaient d’aA’oir soit leur tombeau séparé, soit une place dans le tombeau consacré à la corporation, à la famille, à la clientèle ou à la domesticité à laquelle ils appartenaient. Les premiers chrétiens éprouvaient, pour leur compte, le même sentiment. L’Eglise, d’ailleurs, leur faisait une loi de ne point mêler leurs restes mortels à ceux des païens. Aussi les riches, qui entrèrent plus tôt qu’on ne croit dans la communauté chrétienne, considèrent-ils de bonne heure comme une œuvre méritoire d’offrir à leurs frères dans la foi l’asile de leurs domaines funéraires. Dans le champ, parfois très vaste, qu’une opulente famille avait originairement destiné à recevoir les tombeaux de ses membres, de ses serviteiu-s, de ses clients, ou dans un jardin auquel un pieux fidèle, une charitable matrone, donnait tout à coup une destination sépulcrale, on voyait s’ouvrir un ou plusieurs centres de sépultures, groupées parfois autour du tombeau d’un martyr. La forme de chambres ou de galeries souterraines, adoptée généralement, au moins à Rome, pour ces premières nécropoles chrétiennes, permettait d’enterrer dans le tuf de leurs parois un grand nombre de défunts. M. Michel de Rossi a calculé qu’une de ces cryptes primitives, celle de Lucine, sur la voie Appienne, circonscrite dans une aire de cent pieds sur cent quatre-vingts, pouvait contenir deux mille sépultures. Il résulte des calculs du même savant que la moyenne de l’excavation catacombale sur une surface carrée de la trois cent quatre-vingt-quinzième partie d’un mille carré comprend, en supposant un seul étage souterrain (et les catacombes en eurent quelquefois deux ou trois), mille mètres de galeries. On voit quelle multitude de cadavres trouvait place dans les espaces relativement petits que pouvait offrir la charité privée. Même en temps de persécution, ces pieux asiles, protégés par le caractère « religieux » ffue la loi reconnaissait à tous les terrains consacrés par des sépultures, se développèrent librement. Les plus anciens tombeaux chrétiens avaient soit leur escalier, soit leur façade, donnant sur la campagne ou la voie publique : on ne prenait nulle précaution pour en dissimuler l’entrée.

Cependant, le moment devait venir où la plupart des cimetières chrétiens seraient trop considérables pour rester la propriété des familles qui les avaient fondés. Beaucoup d’entre eux passèrent successivement dans le patrimoine ecclésiastique, c’est-à-dire devinrent la propriété commune de l’église établie au lieu où ils se trouvaient. C’est ainsi que la crypte où reposait sainte Cécile, avec de nombreux fidèles.

et qui appartenait à la famille des Cæcilii, fut, vers la fin du second siècle, donnée par ceux-ci au pape Zéphyrin. Le pape confia au premier diacre, Calliste, l’administration de ce cimetière, le premier qu’ait possédé officiellement l’Eglise romaine. Rome n’est pas la seule ville où des terrains funéraires aient été ainsi donnés par des particuliers à l’Eglise. Un marbre trouvé dans les ruines de Césarée (Cherchell), en Mauritanie, a consacré par l’inscription suivante le souvenir d’un de ces actes de donation :

AREAM AT SBPVLCRA CVLTOR VERBl CONTVLIT

ET CELLAM STRVXIT SVIS CVNCTIS SVMPTIBVS.

ECCLESI.ÎÎ SANCT.ï ; HANC RELIQVIT MEMORIAM.

SALVETE FRATRES PVRO CORDE ET SIMPLICI

EVELPIVS VOS SATOS SANCTO SPUUTV.

« Un adorateur du Verbe a donné cette aire pour

des sépultures, et a bâti le lieu de réunion (cellà) entièrement à ses frais. Il a laissé ce monument (memoria ) à la sainte Eglise. Salut, frères ; d’un cœur piU’et simple Evelpius vous salue, enfants du Saint-Esprit. »

On se demande comment, à une époque où la religion chrétienne n’était pas reconnue par l’Etat, et même était violemment persécutée, lEglise put ainsi recevoir des donations immobilières, et en jouir sans trouble. La réponse qui me paraît la plus vraisemblable est faite par de Rossi. Les associations de secours mutuels formées par de petites gens, libres et esclaves (collegia tenuiontm), en vue d’assurer mutuellement la sépulture des sociétaires, et admettant dans leur sein de riches donateurs à titre de membres honoraires ou patrons, pafroni. eurent depuis le premier siècle à Rome le droit d’exister sans une autorisation spéciale, el de posséder les immeubles nécessaires à leur objet. Le même droit fut, au commencement du III siècle, concédé par Septime Sévère aux sociétés de ce genre qui se créeraient dans les provinces. La comparaison entre un texte du jurisconsulte Marcien, relatif à leur organisation, et un passage où TertuUien décrit les réunions des chrétiens, semble établir que les églises, au temps de l’apologiste africain, aA aient généralement pris la forme extérieure de ces corporations funéraires. Les mêmes traits se rencontrent : assemblées périodiques, cotisations mensuelles, caisse commune, etc. Le grand nombre des pauvres, des artisans, des esclaves entrés dans l’Eglise, donnait aisément à celle-ci l’apparence d’un « collège de petites gens », où les riches cependant avaient leur place comme bienfaiteurs. Même le titre officiel porté par les communautés chrétiennes, dans les rapports qu’elles pouvaient être aj^pelécs à entretenir avec l’Etat en qualité de corporations funéraires, paraît indiqué parles documents : l’inscription de Césarée et plusieurs autres montrent qu’elles s’appelaient « les frères », « l’assemblée des frères », ît àSs/iîi’, fratres, ecclesia fratrnm. La forme extérieure des collèges funéraires, ainsi adoptée, dans cette hypothèse, par les principales églises, leur permettait de posséder des biens meubles et immeubles ; ainsi peut-on expliquer comment, au m" siècle, beaucoup de catacombes cessèrent d’être des propriétés privées, pour devenir la propriété du corps même des chrétiens. Ce fut l’époque de leur plus grand développement architectural ; alors aussi s’éle-Aèrent, dans les enclos sous lesquels s’étendaient les galeries souterraines, des édifices destinés aux réunions des fidèles et à leiu-s repas fraternels ou agapes, édifices analogues à ceux qui servaient aux assemblées et aux fêtes profanes des collèges funéraires. Une construction de ce genre existe encore à l’entrée de la catacombc de Domitille, prcs de la voie Ardéatine.