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AGNOSTICISME

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cevable. « Celui qui croirait qu’il est un, possédant de nombreux attributs, exprimerait bien par sa parole qu’il est un ; mais, dans sa pensée, il le croirait multiple. Cela ressemblerait à ce que disent les clirétiens : Il est H « , cependant II est trois » ; 1. 1, p. 181. Maïmonide cherche donc à s'élever à Vun des néoplatoniciens, à la simplicité absolue, à « une idée unique qu’on trouve une de quelque côté qu’on l’envisage et à quelque point de vue qu’on la considère… et dans laquelle il n’existe point de multiplicité ni hors de l’esprit (objectivement), ni dans l’esprit (subjectivement ». p. 184. Cf. les propositions condamnées de maître Eckart, Denzinger, 023 sq. (450 sq.), 528 (4ô5). S. Thomas a fort bien vu l’importance du prol)lème, et parlant de la connaissance objectife et de la distinction des attributs en Dieu, il écrit que toute la théologie trinitaire et toute la théologie rationnelle dépendent de cette question : ex hoc pendet totus intellectus eovum quæ in primo libro (Sent.) dicuntur. Cf. Werner, der heilige Thomas, Regensburg : , 1889, t. I, p. 325 ; S. Augustin, cotit. Maximinum, 2, 10 ; Argentixas, in I, dist. 6, ad 2, obj. 10 conf. ; Pugio pdei. p. 3, d. 1, c. 4- Et il admet la connexion aperçue par Maïmonide entre l’objectivité des attributs allirmatifs, leur distinction — car la distinction que nous en faisons subjectivement est aussi une connaissance ou une modalité de notre connaissance dont il faut rendre compte — et le dogme trinitaire : Sed contra : sicut Deus est vere Pater, iia etiam est vere sapiens. Sed ex hoc quod vere Deus est Pater, non polest dici quod ratio paternitatis sit in intellectu tantum ; ergo nec ex hoc quod Deus vere est sapiens putest dici quod ratio sapientiæ sit in intellectu tantum ; in Sent., 1, dist. 2, q. i, art. 3 ; voir SuAREZ, de Deo, lib. i, cap. 9, n. 9.

Théologicjuement, le raisonnement est le suivant. Il est déhni que le Fils est consubstantiel au Père, ix rf, i o’Jk’k ; t « 0 -nv-rpcii, Denz., 54 (17). Donc, conclut S. Athanase, lorsque nous disons Dieu ou nommons le Père, nous signifions la substance divine et non autre chose ; autrement, comment le concile de Nicée a-t-il pu dire que le Fils est de la substance du Père ? Cf. Joaxxes Cyparissiota, Expositio materiaria, decas 10, cap. 1, Migne, P. G., t. CLII, col. gSg ; coll. décade 4> cap. 9, col. 799. Mais si le Fils n’est pas de la substance du Père, si le Père n’est pas Dieu, seulement dans notre esprit ; et si notre intelligence perçoit que le Fils est de la substance du Père et que le Père est Dieu, indépcndannnent de notre manière de les concevoir ; il faut de toute nécessité que les attributs absolus soient en Dieu et non pas seulement dans notre esprit ; que notre intelligence perçoive qu’ils sont en Dieu indépendamment de notre manière de les concevoir. En effet, c’est par les attributs absolus, conçus d’une façon plus ou moins al)straite, que, tout en maintenant la distinction des personnes, non seulement nous concevons l’identité de nature, mais adirmons, sur la parole divine, l’unité de substance et l'égalité des personnes : neque confundenles personas neque suhslantlani séparantes ; alia est enini persona Patris, alia Filii. alia Spiritus Sancti ; sed Patris et Filii et Spiritus Sancti una est divi/iilas… ; qualis Pater, talis Filius.(Syml)., J//irt//.)Supi)()sez (jue les attributs absolus, (jui sont cd^nmuns par identité aux trois personnes, ne sont pas eu Dieu, mais seulement dans notre esprit ; et que nous ne pouvons rien concevoir de Dieu indé[)eiuianinieiit, je ne dis pas de notre pensée, mais de notre mode de penser : nous voilà condamnés « au i)sillacisnu' sacré » dont nous menace ]M. Le Roy (Dogme et critique, p. 132), et nous sommes les perrocpu-ts dont se mocpie M. ïvhuei.l {Through Scylla and Charyhdis, p, 34 1) ; nous ne

pourrons même plus être Unitariens, ou Trithéistes, Ariens ou Sabelliens ; et l’Eglise, en face de la formule du baptême, ne pourra jamais s'élever à la comprendre assez pour exchu’e ces erreurs, ad aliquid veritatis capiendum, quod sufficiat ad excludendos errores. (De pot., quæst. 9, art, 5 ; coll. art. 8.)La conséquence est absurde. Aussi S. Thomas, se conformant à la terminologie des Pères et en particulier à celle de saint Augustin et du pseudo-Denys, conclut : les noms allirmatifs et absolus, comme bon, sage, signifient la sul^stance divine et se disent de Dieu substantiellement, Sunima, I, q. 13, art. 2 ; I, dist. 2, q. I, art. 2. Ce qui veut dire, remarque Vasquez très doctement, que certains noms de Dieu signifient id quod in Deo vere et realiter est, sive illud sit suhstantia, sive relatio, in I, disp. 5^, n. 27 sqq. ; de pot., quæst. 9, art. 7, ad i et 4- En style moderne : de même que la formule trinitaire, les attributs divins ont une portée métaphj’sique, et par eux nous concevons la nature intrinsèque de Dieu. Voici comment les théologiens énoncent cette doctrine : 1° Attrihuta affirmativa absoluta prædicantur de Deo ad designanduni aliquld posiiivum intrinsece et formaliter Deo conveniens. Propositio est de fîde^ dit le grave YsAMBERT, in I, q. 4 » îii’t. 3, viii ; d’autres disent pro.rima fîdei. 2" Eadeni attributa quanquam a nobis instar proprielatum, essentiani divinani consequentium, apprehendantur, re tamen vera ipsam divinani substantiam significant. Cette seconde thèse découle de la première, étant donnée la simplicité divine : Deo hoc est esse quod fortem esse, vel sapientem esse, et si quid de illa simplicitate dùreris. qua ejus substantia significutur (S. Augustin, de Trinit., ~, I et 15, 5. Cf. Urraburu, Theod., t. I, p. 297). Xon, répond M. Tyrrell, la formule trinitaire n’a pas « de valeur métaphysique » mais « seulement une valeur symbolique », ^'cj// « , p. 343. Non, répond M. Le Roy,

« la donnée dogmatique ne se présente pas comme

exprimée par des concepts, comme définie par ses déterminations intrinsèques », Dogme, ). 133. Xous y reviendrons, infra. VIll, B.

b) Voici comment Maïmonide mène sa démonstration : 1° Les termes figurés de l’Ecriture sont tous

« dérivés des actions divines », p. 224, ils se réduisent

donc à des attributs relatifs. 1° Or, les attributs relatifs ne nous apprennent rien de l’essence di^ine en elle-même ; ils ne pourraient le faire que s’il y avait une relation réelle entre Dieu et la créature : mais il n’y en a pas, comme les attributs négatifs d'éternité et d’immensité le prouvent. 3" D’un autre côté, les attributs essentiels, absolus — Maïmonide nomme vivant, puissant, sachant, voulant : c’est la personnalité divine, — a) se ramènent eux aussi à des attributs d’action ; b) ceux qui les admettent en Dieu les conçoivent comme une qualité, une détermination intrinsè(pie à Dieu ; mais aucune détermination ne peut se dire de Dieu et de la créature que par homonymie. Donc, ni les termes figures, ni les attributs négatifs, ni les attributs d’action ou i-elatifs, ni les attributs absolus, ne signilient rien qui soit en Dieu. ^" Que veulent donc dire ces noms divins ? a) Ou bien ils signifient i)urement le fait que Dieu a produit les êtres, sans rien dire de sa « capacité artistique » : c’est comme lorscpie, n’ayant pas en vue les talents de Zéid, on dit simplement : Zéid est celui (jui a charpenté celle porte, p.. ! o4. b) Ou bien ils signifient cjue l’elFel produit est tel (ju’il serait, s’il était r<euvi’e tl’un être inlelligenl, p. 244 = tout dans le nu)nde se passe comme si. 5° a) Ci, passant de l’elfel à la cause, nous disons ([ue Dieu est vivant, intelligent, le sens est purenu-nt négatif : nous ne voulons jias dire (jue Dieu en soi est vivant, intelligent, mais simplement qu’il n’est pas comme