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BABYLOiNE ET LA BIBLE

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Nabucliodonosor alla en Egypte ; aussi les historiens TiELE, Mac Clrdy, Maspero, Rogers, Winckler, etc., ont-ils admis la réalité de cette expédition, qui avait été contestée par plusieurs critiques.

Quelques mots sur Cyriis. Avant le déchiffrement des inscriptions cunéiformes Cyrus n’était connu que par le roman de Xénophon (la Cyropédie), les récits plus ou moins légendaires d’Hérodote et de Ctésias, et divers passages de la Bible. D’après le témoignage clair des documents babjloniens, Cyrus n’est pas le « monothéiste fervent », « l’ennemi implacable des idoles y> que l’on croyait ; M. Vigouroux le remarque fort justement (BDM^, t. IV, p. 4 1 3). Les anciens commentateiu’s de la Bible ont été sans doute induits en erreur par quelques passages des prophètes, pris au pied de la lettre trop facilement, et sui-tout par le texte Is. XLI, 25, « Du Levant il invoquera mon nom », c’est-à-dire il adorera lahvé. Mais très probablement, d’après le parallélisme de xli, 2 ; xlv, 4> 13 ; xlii, 6, il faut ponctuer le verbe autrement, et lire « // est appelé par son nom » (voir A. Coxdamin, Le Livre d’Isaie, p. 249).

Quant à la prise de Babylone, nous sommes avertis par les inscriptions qu’il ne faut pas prendre au pied delà lettre les détails de la mise en scène dans l’annonce de cet événement par les prophètes (Is. xiii ; XLVi, 1, 2 ; XLvn ; Jér. l, li). Les conquérants sont entrés à Babylone sans coup férii- (bala saltiim) ; le changement de souveraineté s’est opéré sans secousse, et l’installation de Cyrus dans sa nouvelle capitale s’est faite, semble-t-il, d’une façon pacifique et toute naturelle. On peut constater à quelques joiu*s près la succession des règnes svu" de nombreux contrats de cette époque, publiés parle P. Strassmaier. Dans les tableaux poétiques des passages cités, sous les images et les métaphores, deux faits souverainement importants pour le peuple élu ont été prédits d’après la révélation divine : la chute de la dynastie qui régnait alors à Babylone, et la fin de la captivité juise. Cette double prophétie s’est exactement réalisée (voir Etudes, t. XCIII, p. 448-453).

Cette énumération n’a pas la prétention d’être complète, loin de là ; il faut nécessaii-ement se borner à quelques exemples. En A^oici encore deux ou trois, avant de passer à un autre sujet.

Un mot d’Ezéchiel était le plus ancien témoignage sur la ville de Helbon, au nord de Damas, et sur son vin fameux (Ez. xxvii, 18). Or, le vin de Hilbunu se trouve mentionné dans une inscription de Nabuchoilonosor et dans une liste de vins sur une tablette ])ilingue. — Il y aurait une foule de rapprochements intéressants à faire entre les noms géographiques donnés par la Bible, et ces mêmes noms retrouvés dans les inscriptions. Mais ce sujet ayant une portée apologétique moins considérable, on ne saïu-ait entrer ici dans le détail. Le lecteur pourra consulter les articles du P. DnoRME sur Les pays bibliques au temps d’El-Amarna, RB, oct. 1908, p. ôoo-Sig ; janv. 1909, p. 50-73.

Obstiné dans l’étrange théorie dont j’ai parlé plus haut (col. 333), M. Maïu-ice Vernes n’a pas voulu profiter des rudes leçons que lui infligeait l’assyriologie. Il prenait en pitié les savants qui n’ont pas su voir dans le livre de Jérémie « une composition libre, d’un caractère franchement pseudéjngraphe ». A propos de Jér. vii, 18 ; viii, 2, il déclai-ait avec une parfaite assm-ance : « Les allusions au culte de « la reine du ciel » et à l’astrolâtrie nous transportent en plein paganisme syro-phénicien ou syro-grec » {Du prétendu polythéisme des Hébreux, 2’partie, p. 441).

Voici le passage du prophète :

Les enfants ramassent du bois,

les pères allument le feu,

Les femmes pétrissent la pâte

pour faire des gâteaux à la reine du ciel…

Au lieu de nous transporter dans le monde syrogrec, les expressions de Jérémie rappellent, à n’en pouvoir douter, un usage du culte babylonien. « La reine du ciel », c’est la déesse Istar : sarrat samé est justement un des noms sous lesquels on l’invoque. L’offrande de gâteaux fait réellement partie de son culte. Le mot hébreu kan’àn, gâteau cuit, employé seulement ici et dans un passage parallèle (xliv, 171 9), est identique au mot babylonien kamânu, kawânu, usité, pour le même rite, avec le même sens (Jensen). Ce terme technique, si bien saisi et conservé par Jérémie, a été emprunté à Babylone en même temps que le culte de la déesse (Zimmerx, KAT^, p. 440- Quant à l’astrolâtrie, pas n’est besoin pour l’expliquer de descendre à l’époque grecque, attendu que les divinités astrales étaient en honneur à Babylone depuis un bon nombre de siècles.

Enfin, à côté de l’histoire, de la géographie et de l’archéologie, l’étude de la langue babjlonienne el assyrienne est pleine d’intérêt, même du point de vue qui nous occupe. Il suftit, pour s’en rendre compte, d’ouvrir les dictionnaires hébreux de Gesexius-Buh : . ou de Gesexius-Browx. On peut voir quelques exenples dans Etudes, t. XCIII, p. 434-436.

Le Code de Hammourabi et la Loi mosa’ique.

— Le code de Hammourabi, découvert à Suse en dt cembre 1901-janvier 1902, est daté par le fait mêm qu’il a pour auteur ce grand roi de Babylone (voir plus haut, col. 352). C’est la codification, avec additions et modifications, des lois et coutumes qui, vers 2050 avant Jésus-Christ, existaient en Babjlonie depuis un certain temps. Plusieurs dispositions et formules juridiques du code se trouvcnt déjà dandes contrats antérieurs à l’épocpie de Hammourabi

ScHEiL déchiffra aussitôt ce document incomparable, le traduisit et en donna une admirable édition dans l’espace de cjuelques mois (grande édition en 1902 ; édition de vulgarisation en 1904 : je m’en servirai beaucoup dans les pages suivantes). C’étai’l’année même où éclatait la controverse Babel une Bibel ; et l’on vit paraître bientôt toute une sérit d’études sui’cette législation comparée à la législa tion mosaïque. Un des plus importants travaux es celui de M. Stanley A. Cook, The Laws of Moses ant The Code ofHammurabi, igo3. Signalons encore ceu : de D. H. MÛLLER et de H. Gri.mme. On ne peut songe à faire ici cette comparaison en détail. Il suffira d’s’en tenir aux points principaux, à ceux qui metten le plus en relief l’analogie ou la différence des deu : codes. Moise — quelle que soit l’époque exacte d l’Exode (voir plus haut, col. 353) — a vécu plusieur siècles après Hammourabi. De plus, sa législation reçu, au cours des siècles (au sentiment même de exégètes catholiques les plus conservateurs, tel qii M. Hoberg), des compléments et modifications asse considérables. Il n’est pas nécessaire, pour le but i( visé, de distinguer ces diverses couches, et de leu assigner une date ; il resterait toujours la ditficull de savoir si telle loi, avant d’être codifiée, n’éta pas en usage depuis un temps plus ou moins long.

(Le signe § indique les articles du code de Hai mourabi.)

Le mariage et la famille.

Le mariage. — Chez les Babjloniens, c’est le pè’qui choisit une femme pour son fils (§§ 155, 156, 16C D’après un contrat du temps de Cyrus, un jeur homme, à l’insu de son père, avec l’appui de son frèi

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