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CËI.TKS i.KI.ICION I

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ces épopées, loin d être le miroir fidèle « les vieilles traditions et croyances, ne procède en grande partie que de l’imagination très fantaisiste des conteurs. D’ailleurs, il est reconnu que ces récits épiques ont été remaniés à l’époque chrétienne, 4 et c’est justement sur les anciennes doctrines et pratiques païennes qu"ont dû porter les retouches des clercs du moyen à^e. On a remarqué avec assez de raison qu’à puiser sans discernement à de pareilles sources nous agirions avec une légèreté comparable à celle des gens de l’avenir qui demanderaient a noa C.nies de fées le secret de nos croyances actuelles.

U. La religion des Celtes païens du continent : i. Les druides. — Pour Julks Cksau, la Gaule est bien le centre de la puissance celtique Tout en guerroyant contre les Gaulois, il s’appliqua à les étudier, et il nous a laissé de précieux renseignements sur leur religion et spécialement sur leurs druides.

Voici d’abord ce qu’il dit de leur rang social.

« Partout en Gaule il y a deux classes d’hommes qui

comptent et sont considérées. Quant aux gens du peuple, ils ne sont guère traités autrement que des esclaves, ne pouvant se permettre aucune initiative, n’étant consultés sur rien… Pour en revenir aux deux classes dont nous parlions, l’une est celle des druides, l’autre celle des chevaliers. » (De bcllo gallio, VI, 13).

On a nié que les druides fussent prêtres. Pourtant le caractère sacerdotal de ceux de Gaule ne parait pas douteux. Ils n’étaient pas que cela, il est vrai ; à leurs fonctions sacerdotales, il » joignaient celles de professeurs, d’arbitres, de juges des causes civiles et criminelles Voici ce que César nous apprend de leurs attributions : « Les premiers (les druides) s’occupent des choses divines (rébus cln’inis intersiint), ils président aux sacrilices publics et privés, règlent les pratiques religieuses (religiones interpretantur). Les jeunes gens viennent en foule s’instruire auprès d’eux, et on les honore grandement. Ce sont les druides, en effet, qui tranchent presque tous les conflits entre Etats ou entre particuliers, et, si quelque crime a été commis, s’il y a eu meurtre, si un différend s’est élevé à propos d’héritage ou de délimitation, ce sont eux qui jugent, qui fixent les satisfactions à recevoir et à donner. » (Bell, gall., VI, 13.)

Des peines imposées par les druides, celle de l’interdiction des sacrilices et celle de l’excommunication étaient considérées comme les plus graves.

« Un particulier ou un peuple ne s’est-il pas conformé

à leurs décisions, ils interdisent les sacrifices. C’est chez les Gaulois la peine la plus grave. Ceux qui ont été frappés de cette interdiction, on les met au nombre des impies et des criminels, on s’écarte d’eux, on fuit leur abord et leur entretien, craignant de leur contact impur quelque effet funeste ; ils ne sont pas admis à demander justice, ni à prendre leur part d’aucun honneur » (VI, 13).

Sur l’organisation des druides et sur leur grande assemblée annuelle, nous avons les renseignements suivants : « Tous ces druides obéissent à un chef unique, qui jouit parmi eux d’une très grande autorité. A sa mort, si l’un d’entre eux se distingue par un mérite hors ligne, il lui succède. Si plusieurs ont dea titres égaux, le suffrage des druides, quelquelois même les armes, en décident. Chaque année, à date fixe, ils tiennent leurs assises en un lieu consacré, dans le pays des Carnutes, qui passe pour occuper le centre de la Gaule. Là, de toutes parts, affluent tous ceux qui ont des différends, et ils se soumettent à leurs décisions et à leurs arrêts » (VI, 13).

Sur l’origine de la doctrine des druides, noua avons aussi quelques mots de César. ni ; iis qui ont donné lieu à diverses interprétations. Faisons remarquer, d’ailleurs, que le eapitafne-histoiien se borne à rapporter une opinion sur ce point (exiltiutatiir).

« On croit, dit-il, que leur doctrine ( « ’pliiin) est née en Bretagne, et a été apportée de cette

ile dans la Gaule. De nos jours encore, ceux qui veulent en faire une étude approfondie vont, le plus souvent, s’instruire là-bas » (VI, 1 3) Ce qui est ici donné comme certain, c’est que les druides gaulois allaient étudier en iiretagne la discipline druidique, qui s’y était vraisemblablement conservée dans sa pureté originelle. Or, on Unit par croire que cette discipline ou que même l’institution druidique avait son origine en Grande-Bretagne.

A la fois prêtres, magistrats et professeurs, les druides jouissaient de privilèges et d’exemptions sur lesquels nous éclaire également le De bcllo gullico

« Les druides s’abstiennent habituellement d’aller à

la guerre et ne paient pas d’impôts comme les autres ; ils sontdispensés du service militaire et exempts de toute charge. Attirés par de si grands avanta^ s, beaucoup viennent spontanément s’initier à leur discipline, beaucoup leur sont envoyés par les familles » (VI, 14).

En quoi consistait leur enseignement, et de quelle manière était-il donné ? « On dit qu’auprès d’eux ils (leurs disciples) apprennent par cu’ur un nombre considérable de vers. Aussi plus d’un reste-t-il vingt ans à l’école. Ils estiment que la religion ne permet pas de confier à l’écriture la matière de leur enseignement, alors que pour tout le reste en général, pour les comptes publics et privés, ils se servent de l’alphabet grec. Ils me paraissent avoir établi cet usage pour deux raisons, parce qu’ils ne veulent pas que leur doctrine soit divulguée, ni que, d’outre part, leurs élèves, se fiant à l’écriture, négligent leur mémoire ; car c’est une chose courante : quand on est aidé par des textes écrits, on s’applique moins à retenir par cœur et on laisse se rouiller la mémoire. » (tbid.)Ce passage de César nous apprend d’abord que les druides étaient familiarisés, sinon avec la littérature des Grecs, du moins avec leur alphabet, et, de plus, qu’à leurs autres fonctions s’ajoutait encore celle de comptables : la tenue des comptes publics et privés rentrait ainsi dans leurs attributions.

Les connaissances des druides, tant sacrées que profanes, étaient tenues en haute estime par les Anciens. Diodoiik ni : Sicilh les traite de philosophe^ etde théologiens (Bibliothèque historique, V, 31. a-">). STRABON les montre s’occupant d’histoire naturelle, étudiant la philosophie morale et servant d’arbitres dans les conflits (Géographie, IV, 4, c. 197, 4)- Suivant PoHPONIDS Mula, 1 ils déclaraient connaître la grandeur et la forme de la terre et du monde, b"~ mouvements du ciel et des astres et la volonté ! e^ dieux. L’enseignement prolongé et secret qu’ils donnent aux plus nobles de la nation dure vingt ans ; ils enseignent dans les grottes et les lieux écartés ». (De situ orbis, ou Ckorograpkim, III, 18), <>n lit aussi dans le De bellu galtico (VI, l4) qnc’, >s druides se livraient à de nombreuses spéculations sut les astres et leurs mouvements, sur les dimensions du monde et celles de la terre, sur la nature des choses, sur la puissance des dieux immortels et leurs attributions, et qu’ils transmettaient ces doctrines à la jeunesse ; et c’est probablement à ce passage de César que l’omponius Mêla aura emprunté le passage cité sur les druides. Indépendamment « les raisons philologiques, tout ceci semblerait donner assez de i vraisemblance à l’opinion de T111 rnkysbn, qui veut