— Que dis-tu, mon chéri ?
— Alyçum m’a dit : tu peux épouser la fille du Cheik-el-Balad.
— Qu’Allah le veuille ! répliqua la négresse. Tout est possible. Allah est grand !
Ils demeurèrent tous deux silencieux, Goha réfléchissant à ses noces prochaines, et Hawa aux enfants qu’il aurait après son mariage et qu’elle porterait contre sa poitrine, à la place même où elle avait tenu leur père.
— Mon chéri, dit-elle, hier j’ai fait un rêve… Il y avait une grande échelle, grande… grande… et toi, tu montais l’échelle… C’est un bon présage.
— C’est un bon présage, affirma Goha.
Il songeait à la fête splendide qu’il offrirait aux habitants d’El-Kaïra le jour de l’heureux événement. Il ferait venir des almées, les plus belles du pays, il ferait suspendre des milliers de lampions autour des tentes multicolores, il ferait égorger toutes les génisses et tous les moutons du monde et il gaverait ses invités d’œufs bouillis, de fèves, de concombres et de boutargue.
— Mon chéri, reprit Hawa, si tu suis mes conseils, tu pourras épouser même la fille du Sultan… Seulement tu dois devenir sage et lire ton Coran… Occupe-toi des affaires de ton père, recherche la société des hommes mûrs, des cheiks, comme notre voisin par exemple, et si, avec ça, tu m’aimes bien, celui qui est en haut, t’accordera tout ce que tu désires.
Mais Goha ne l’écoutait pas. Il songeait aux cadeaux qu’il ferait à ses amis, pour les intéresser