il n’hésitait pas à interrompre ses élégants compagnons, pour émettre la pensée que dans leurs phrases lui suggérait par moments, un mot, le seul qu’il eût compris.
— Supposons, dit Alyçum, qu’une Bédouine, montée sur un chameau, soit arrêtée en route par un pont, parce que sa tête dépasse… Que doit-elle faire ?
— Démolir le pont, formula gravement Mokawa-Kendi.
— Couper les jambes du chameau, répliqua sur le même ton Akr-Zeid-Taï.
— Pourquoi, protesta Goha, pourquoi ? Elle n’a qu’à baisser la tête !
À ces mots, les jeunes gens s’emparèrent de Goha. Ils lui baisèrent les joues, l’étreignirent violemment.
— Ô fleur d’intelligence ! Toi le plus beau d’entre nous !
Goha prenait les mains qu’on lui tendait et, la gorge serrée d’émotion, ne put que répéter :
— Elle n’a qu’à baisser la tête…
— Viens, Mohamed ! criait Alyçum en s’adressant à un esclave. Le fils de Hadj-Mahmoud a parlé ! Il meurt de soif ! Apporte des sirops !
— Le fils de Hadj-Mahmoud a parlé ! Il meurt de faim ! Apporte de la viande et du fromage !
Goha se débattait contre ces délicates attentions, assurait ses amis qu’il n’avait ni soif, ni faim et dut se taire, car Mokawa-Kendi lui avait enfoncé dans la bouche le bec d’un chibouk, avec un courtois :