sa personne une expression de rayonnement, de force, de jeunesse.
— Un crocodile, Abd-el-Akbar ! un crocodile !
— Ça arrive, ça arrive, répondit le vieillard en hochant la tête, assieds-toi et mange des dattes…
Il tira Goha à ses côtés et reprit :
— Un crocodile… J’en ai vu un le cinquième jour de la dernière lune. Je venais de pêcher un bayad grand… grand comme toi.
Il fit une pause pour juger de l’effet de son exploit, mais Goha ne l’écoutait pas. L’oreille aux aguets, les narines frémissantes, il était attentif à tous les bruits, à tous les mouvements de l’île.
— Tu entends ? insista le pêcheur… il était grand comme un palmier…
Et comme Goha ne répondait pas, il lui conseilla rudement de rajuster son turban qui, s’étant déroulé, lui pendait sur l’épaule et d’aller à la recherche de la babouche qu’il avait dû perdre dans sa course.
— Je ne l’ai pas perdue, riposta Goha, qui croyant être très comique riait aux éclats, c’est le crocodile qui l’a mangée…
Contre son attente, le pêcheur se renfrogna davantage. Il se dressa sur ses jambes maigres et s’éloigna. Goha le suivit. Il retrouva sa babouche et emboîta le pas du pêcheur qui, par moments, l’examinait à la dérobée. Abd-el-Akbar attendait un mot d’encouragement pour poursuivre son récit, tandis que Goha humait goulûment l’arome des broussailles. En débouchant dans un terrain profondément excavé, il s’arrêta brusquement. Il