même leurs âges et leurs noms. Quel qu’il fût, Goha lui appartenait davantage par la joie initiale qui avait marqué sa venue… Il fit une dernière tentative et s’adressant à son fils :
— Allons, explique-toi, lui dit-il. Ton plateau est cabossé, les bols sont en morceaux, les boulettes de fèves sont couvertes de boue, le quartier de mouton manque, et tu n’as pas rapporté d’argent. Explique-toi.
Goha ne gardait qu’un souvenir imprécis de ses démêlés avec un épervier et l’attitude menaçante de son père rendait plus pénible son effort de mémoire.
— Tu ne veux rien dire ? Tu es peut-être tombé ? Réponds. Tu as peut-être dansé avec ton plateau sur la tête ?
— La volonté de Dieu, hasarda Goha.
— Que le diable t’emporte ! riposta Mahmoud.
Avant de quitter la chambre il conclut, tourné vers son fils :
— J’étais assez naïf pour espérer t’entendre dire un mot sensé… Malheureusement la chose est impossible… Il ne te reste plus qu’à vivre comme ta mère.
Goha tressaillit. Que lui voulait-on ? Au, lieu de lui expliquer la sentence de Hag-Mahmoud, Zeinab se jeta sur son fils et, d’une voix assez forte pour que son mari pût l’entendre, lui reprocha son ingratitude :
— Ton, pauvre père me fend le cœur, criait-elle, il a fait pour toi tout ce qu’il a pu, il a donné le sang de ses entrailles pour pouvoir s’enorgueillir de toi !