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Mabrouka buvait à petites gorgées une tasse de café qu’un esclave lui avait préparée.

— Mon cheik, dit-elle, où achètes-tu ce café ? Il ne vaut pas celui que nous vendait Sayed-Ahmed.

— Sayed-Ahmed est un voleur. Il a voulu me faire payer deux fois le même sac de café, répondit El-Zaki surpris d’avoir donné ces explications.

— J’arrangerai cela, dit Mabrouka. Le café de Sayed-Ahmed était meilleur. Si son café…

En proie à une exaspération subite, El-Zaki l’interrompit :

— Que veux-tu ? Dis-moi pourquoi tu es venue ?

Sa voix était mauvaise. Sans se laisser démonter par tant d’hostilité, Mabrouka déposa sa tasse :

— Tu as raison, dit-elle d’un ton de dignité blessée, je suis une mauvaise épouse. Je t’ai aimé, je t’ai donné des enfants, j’ai gardé tes choses comme la prunelle de mes yeux, mais je suis une mauvaise épouse.

Le cheik haussa les épaules, soupira et se dirigea nerveusement vers la fenêtre. Il constata que Goha était encore là et en pleine querelle avec le portier. « Pourquoi donc cet idiot de portier ne le laisse-t-il pas monter ? » gronda-t-il. Il ouvrit la fenêtre, se pencha au dehors et ordonna vivement à Khalil d’introduire le visiteur. Mabrouka se leva aussitôt en protestant.

— Tu dis à un homme de monter et moi je suis ici… D’ailleurs tu ne devrais pas recevoir le fils de Hag Mahmoud, Khalil a raison, et toi, tu as tort.