Page:Ades - Josipovici - Mirbeau - Le Livre de Goha le Simple.djvu/285

Cette page a été validée par deux contributeurs.

La négresse se fit douce, insinuante.

— Qu’y a-t-il donc ce soir ? Je te vois agitée… Quelqu’un est-il malade chez vous ?

— Dieu te récompensera, Hawa… Appelle Goha, ton jeune et gentil maître, appelle-le…

Brusquement, la négresse démasqua sa haine. De ses poings noirs, elle menaça la fine Syrienne et, les jambes écartées, les yeux écarquillés, le cou énorme :

— Retourne chez toi, vipère ! clama-t-elle. Il ne vous suffit pas d’avoir souillé la maison d’un cheik vénérable, vous voulez encore débaucher un honnête garçon ! Va-t’en chouette ! Que les cheytans vous étouffent, toi et ta maîtresse, que la lèpre vous ronge la peau et que le feu dévore vos entrailles…

Elle écumait de rage. Incapable de trouver une imprécation digne de sa colère, elle saisit le balai du jardinier et l’abattit violemment sur le dos d’Amina. L’esclave de Nour-el-Eïn, sans protester, baissa la tête et s’éloigna.

Masquant la porte de son épaisse carrure, Hawa la poursuivit de ses malédictions et de ses cris.