— De la crème et de l’eau de rose.
Quelques femmes s’étaient mêlées au groupe. Elles éclatèrent de rire au spectacle de cet amour enthousiaste. Les nouvelles venues interrogeaient les autres du regard, cherchant à deviner la cause de leur hilarité. Goha, le visage rayonnant, parlait avec des gestes lents :
— Quand elle marche, elle fait comme ça… Allah ! Allah ! De la crème et de l’eau de rose !
Affolé par son souvenir, il se donna des claques sur la nuque, poussa son âne et, sans autre transition, se mit à crier à tue-tête :
— Voici les fèves !… vertes les fèves !
Les femmes s’accrochèrent à lui, le questionnèrent. Il ne répondit pas autrement que par son cri « voici les fèves !… vertes les fèves !… » Elles eurent alors l’idée de lui exprimer leur sympathie en lui achetant à la fois toute la charge de son âne. Aucunes d’elles ne se déroba à cette manifestation cordiale. « Un kadah, un demi-kadah ». De toutes parts, des bras se tendirent.
— Doucement, doucement, balbutiait Goha sans dissimuler sa joie. Il pesait, encaissait, repesait, encaissait encore. Le contenu d’une couffe étant épuisé, il entama la seconde et bientôt fut navré d’en trouver le fond. Il avait cru que cela serait ainsi, toujours !
— Tu es content ? demanda l’aînée des deux sœurs, tu n’as jamais tant vendu. Et maintenant que ta soirée soit bénie.
— Tu reviendras nous voir, ajouta la cadette, nous t’achèterons tes fèves.