avait combiné dans ses moindres détails la scène qui allait s’ensuivre ; elle avait soigneusement préparé ses répliques, elle avait prévu celles de Goha. L’inexplicable immobilité de son amant la déconcerta. « Il ne m’a pas vue », se dit-elle, quelque peine qu’elle eût à l’admettre, et elle résolut de patienter. Cependant Goha ne semblait nullement se conformer au rôle qu’elle lui avait assigné. Calmement ses grands yeux se posèrent sur elle, s’en allèrent ensuite aux étoiles, à droite, à gauche, pour retomber enfin sur la jeune femme. Sous ce regard mélancolique, Nour-el-Eïn se sentit défaillir, mais sa faiblesse ne fut que momentanée, car les yeux de Goha fixaient maintenant un point vague dans le désert… Nour-el-Eïn venait de se convaincre qu’on se jouait d’elle. « Il se moque de moi ! » balbutia-t-elle rageusement. L’insolence de Goha la suffoquait.
– C’est à toi à me supplier, oui, à toi ! s’écria-t-elle. Et après une courte pause elle ajouta :
« Allons… Supplie-moi, je te pardonnerai peut-être… Supplie-moi ! »
Ces mots ne produisirent aucun effet sur Goha. Il fallait néanmoins que tout se passât comme elle l’avait imaginé. On eût dit que son bonheur, sa vie étaient l’enjeu de ce pari.
– Viens… Viens me supplier, reprit-elle d’une voix tremblante, je t’en prie, viens me supplier.
Des larmes montaient à ses yeux, ses lèvres frémissaient.
Tandis que la personnalité de Goha s’était dissoute dans l’univers, la conscience de Nour-el-Eïn