ne veux pas… Tu comprends Goha, tout ça m’est égal… qu’est-ce que ça peut me faire ? Tout ça m’est égal… Et d’abord je suis enceinte !…
Cet aveu qu’elle avait lentement préparé, elle fut étonnée de l’avoir fait si simplement. Elle demeura une minute, déconcertée, puis sa fièvre tomba ; elle prit une attitude calme, pudique, humiliée, baissant les paupières comme une vierge dont le sort se joue sans qu’elle veuille l’influencer.
— Voilà, je t’ai dit, mon maître…
Goha sentait qu’on attendait une réponse, une appréciation de sa part, sans saisir le caractère tragique de la révélation qu’on venait de lui faire. Ne sachant dans quel sens parler, il voulut témoigner à la négresse un intérêt poli :
— Si Dieu le veut, tu te portes bien ?
Hawa leva la tête. Dans son visage flasque ses yeux seuls étaient expressifs. Ils annonçaient un dépit haineux qui contrastait avec la douceur apparente qu’elle sut imposer à sa voix, en soupirant :
— Qui sait ce que dira Mahmoud ?
— Laisse-le dire, murmura Goha distraitement, avec un geste évasif.
— Que je le laisse dire ?
— Laisse-le dire, répéta Goha avec moins d’assurance, regardant l’esclave à la dérobée.
— Que je le laisse, dire ? Est-ce que tu es fou ? Réponds-moi !
Pris à partie, Goha se troubla ; il avait émis une phrase, n’importe laquelle, sans en saisir la portée, pour se libérer de Hawa et se reposer de sa longue promenade. Or la négresse exigeait