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et cela du haut de son socle, sans faire un geste, sans même poser sur lui ses yeux de pierre. Il se souvint de l’avoir déjà vue.

— C’est la cheika, murmura-t-il.

Il s’éloigna, en proie à de vagues appréhensions. En marchant, il posa distraitement la main sur la palette épineuse d’un cactus. La douleur déclencha sa colère contre la statue.

— Imbécile, s’écria-t-il, tu n’es pas une cheika… tu n’es rien du tout.

Dès qu’il eut proféré ces paroles, il sourît, craignant de s’être compromis. Il revint sur ses pas et, s’approchant de la déesse, lui tapota les jambes, le ventre amicalement, la chatouilla dans la région de l’aisselle, où Hawa se montrait toujours sensible.

— Ce n’est pas vrai, dit-il sournoisement, l’imbécile c’est moi….

Il espérait une réponse. Une expression de rancune perça sous son hypocrite bonhomie, lorsqu’il se rendit compte qu’Isis avait été inattentive à ses cajoleries. Les nerfs irrités, il asséna une gifle à la pierre. Un instant, intimidé par la témérité de son acte, il attendit le mouvement de colère qui, sans doute, animerait le bras de la cheika. Mais Isis subit l’insulte sans bouger et Goha, irrité de tant de lâcheté, la défia :

— Une cheika ? Toi ?

Il ajouta :

— Tu ne peux même pas me donner un coup de pied !

Il écrasa des plantes, arracha des fleurs avec