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LE LIVRE DE GOHA LE SIMPLE

surtout depuis son mariage avec Cheik-el-Zaki. Les montagnes, les nuits fiévreuses, les séductions sur des passants inconnus, l’existence de Mélek enfin, elle, sa fille, ne l’avait même pas entrevue. Son enfance avait été morne aux côtés d’un père qui, âgé de soixante-dix ans, était presque un aïeul. Lorsqu’elle songeait à ses lamentables amours avec Cheik-el-Zaki, la tête enfoncée dans ses coussins, elle prenait des attitudes compassées. Elle éprouvait le besoin d’exagérer sa détresse pour elle et pour son entourage. Cependant, par une étrange contradiction de sa nature, elle méprisait les consolations que lui attiraient ses pantomimes. Parfois même elle les recevait avec des rires qui étaient presque des ricanements.

C’est ainsi qu’elle répondit à la Syrienne qui lui demandait tendrement si le récit de Mirmah l’avait attristée

— Que tu es sotte, Amina ! Je ne suis pas triste. Je m’amuse.