— Tu me feras mourir, si tu ne poursuis pas, dit Nour-el-Eïn.
Satisfaite, Mirmah lança un nouveau jet de salive.
Maintenant, reprit-elle, Mélek était une grande fille. Comme les vierges de mon pays, elle dansait toute nue. Lorsque les voyageurs frappaient à notre porte, elle se déshabillait sur l’ordre de son père pour illuminer la maison de la blancheur de son corps. Et les voyageurs étaient éblouis comme s’ils avaient regardé le soleil… À l’heure du repos, Mélek accompagnait l’hôte dans la chambre qu’on lui offrait.
— Qu’est-ce qu’elle faisait là ? demanda Nour-el-Eïn avec un léger frémissement… Parle ! tu me tues !
— Hé ! tu le sais bien, répondit Mirmah en souriant. Que de fois, je te l’ai dit…
— Elle restait vierge quand même ?
— Oui, Nour-el-Eïn, elle restait vierge. Sans cela l’homme devait l’épouser ou bien…
Et la vieille fit le signe de s’enfoncer un poignard dans la poitrine.
— Un soir, je m’en souviens, il pleuvait à torrents, un étranger entra chez nous. C’était un marchand de tapis qui venait d’Ispahan et qui s’appellait Abd-el-Rahman… Je lui donne du kaïmak, du miel et du pain. Mélek dort. Je me penche sur elle, je la secoue : « Mon cœur, ma prunelle, il faut accomplir ton devoir. » Elle se lève et, quand le voyageur la trouve dans sa chambre, il se montre mécontent… Ta mère