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L’AVIATION MILITAIRE

fûmes tout émotionné, bien que nous sachions que ces oiseaux carnassiers n’étaient nullement dangereux. Nous en étions littéralement entouré, le bout de leurs ailes nous frôlait presque, marquant leur passage par un bruissement assez semblable au passage du vent à travers la feuillée. C’était un spectacle admirable.

Le chasseur ne perdait pas son temps et les vautours manquaient rarement les débris de viande qu’il leur jetait ; justement c’était lui qui se trouvait placé sur la voie aérienne ; nous remarquâmes avec satisfaction que, de son côté, les vautours étaient très nombreux ; ils montaient bien haut avec leur proie, puis une fois avalée, se laissaient choir sur lui pour en happer une autre ; cela sans un seul battement d’aile et avec une facilité d’évolution étonnante. Ce fut la confirmation évidente de la voie aérienne. Son fils n’était pas si occupé, les rapaces dédaignaient d’aller vers lui et ceux qui s’y aventuraient, alléchés par son panier encore plein, revenaient sans rien prendre, en donnant péniblement quelques battements d’ailes ; dépense de force qu’ils ne font que très rarement et dans les cas dangereux ou urgents. C’est que le jeune homme stationnait à l’envers de la voie aérienne, dans le courant descendant. Cette constatation était non moins importante que la précédente.

Pour plus de certitude et afin de contrôler entre elles les deux observations précédentes, nous fîmes changer le jeune homme de place en le ramenant près du père ; la troupe des énormes oiseaux le suivit et son panier fut bientôt vide. Peu après, au contraire, nous déplaçâmes nos deux aides pour les poster ensemble sur la déclivité qu’occupait précédemment le fils, en distribuant chemin faisant des vivres aux vautours, qui les recevaient fort bien ; mais, insensiblement, leur hardiesse se calmait et ils finirent par rester comme suspendus, tournoyant à une certaine hauteur qui augmentait au fur et à mesure que les porteurs de vivres descendaient ; arrivés au but, hommes et oiseaux restèrent dans leur attitude, les premiers offrant l’appât aux seconds qui ne l’acceptaient plus. Dès lors, nous leur fîmes rebrous-