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éructés, devenaient les dragons d’Alcala. La mezzo soprano allait, pour sûr, apparaître du côté de l’église, tandis qu’à cheval sur une chaise de poste, le maresciallo des carabiniers, beau ténor, ferait son Don José. Des prêtres aux tricornes ineffables, poilus et Basilesques, marmonnaient leurs bréviaires et discutaient en public. Des porteurs de bagage couraient. Parmi les cochers de fiacre claquant du fouet sur le siège mince de leurs petites carrioles, au milieu des minuscules chevaux noirs, nerveux et panachés de plumes de faisan, une gardeuse d’ânes, une vieille épique, à tête de pétroleuse, claquait du bec contre les allemandes vaselinesques, crâne filasse, joues bouffies, yeux en verre et grippe-sous. Plus loin, des guides suivis de transatlantiques glabres, leur faisant payer des oranges dix sous pièce par occasion, se débattaient au milieu d’enfants mendigots. Un groupe compact sorti du café Morgano se ruait pour ne pas rater le départ, poursuivi par des marchands de corail. Costanzo, l’ivrogne, gueulait dans un coin, entouré d’officiers berlinois en congé, monocle à l’œil, poils au papier de verre, tyrolien plumé sur l’arrière, culottes de cheval, et leggins de steeple chase, d’officiers qui le considéraient comme très kolossaal !!

Cependant Muriel, débrouillarde, allait aux ren-