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vieille Europe ? Et le jeune sculpteur se rappelait les flirts aigus et pourtant chastes, la taquinerie d’une promesse qu’on ne tiendrait pas, d’une lèvre jamais abandonnée…

Parmi les aimées d’autrefois, Muriel était la seule à laisser des traces. Il se prenait à regretter son départ de Paris. Qui sait, si Muriel n’avait pas été fabuleusement riche, peut-être aurait-elle voulu ?… Même avec son drôle d’accent qui lui faisait dire d’une petite voix pure des énormités, elle aurait bien accepté de dire à Maleine : oui, devant notaire… Ah Muriel !… Follement, pour rire, à force d’y penser, il finissait par écrire à Miss Lawthorn : il lui disait sa vie, ses errances, ses admirations, sa nostalgie d’elle.

Pourquoi restait-elle l’hiver dans ce Paris de froidure et de laideurs, au ciel de brumes et de rhumes, pourquoi, si même sa mère la menait vers la Riviera, ne lâcherait-elle pas les bords de la grande Bleue et ceux de la roulette pour une libre échappée vers plus d’Orient ? Miss Lawthorn viendrait jusqu’à Rome ; ils pourraient de là descendre du côté de Naples et de la Sicile, vers Palerme, vers Capri — jusqu’à Malte ou à Tunis.

Et comme Gérard laissait sur la lettre courir sa plume mince, une chanson de pipeaux virgiliens se