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russe lui demeurait fidèle. Ces jeunes gens de vingt ans qui, sans traverser la crise humanitaire de Gérard, tressaillaient tous d’un enthousiasme encore mal défini et peu réprimé, accueillirent avec joie le petit Maleine. On organisa des réunions soit chez Gérard soit chez ceux de la coterie qui avaient un semblant de chez eux. Et ce furent les récitations enivrées de Baudelaire, de Mallarmé, et de Verlaine, les Prières sur l’Acropole ou sur la Pierre Blanche, les strophes de Bouilhet et de Samain, les ferveurs suscitées par Barrès le Magnifique, les communions autour d’Huysmans, les frénésies sur Maeterlinck. On lisait aussi l’ironique et tendre Bataille, le savoureux Tailhade, Colette Willy, frère moqueur et païen de Sand, Gérard d’Houville, très patricienne. Dans l’atelier d’Etchenory Fournès le compositeur basque, on évoquait l’âme épuisante de César Franck, les clameurs wagnériennes, les voluptés acides d’un Dukas, d’un Debussy, d’un Egelbrecht.

Mais bientôt, malgré certaines relations charmantes, là aussi des ambitions contraires, des luttes sourdes, des mesquineries se révélèrent. Gérard, à ce moment-là, travaillait à une mort de Narcisse : on en profita pour faire courir sur lui des bruits aussi faux que désobligeants, nés du sujet choisi et