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À cette école, Gérard Maleine sentit battre son cœur plus généreusement. L’amour dont il avait besoin, l’expansion de tendresse qu’il cherchait, cette mélancolie native dans laquelle sa nature se plaisait si bien : amour, tendresse et mélancolie se fondirent en un immense élan vers le peuple.

Sur les conseils de Borodine, Gérard suivit les cours de l’Université Populaire puis, enhardi, prit la parole à son tour et prêcha…

Hélas ! au bout de peu de temps, quelles désillusions, quelles rancœurs ! quelle boutique ! Dénigrements, sottises, spéculations éhontées sur sa générosité et sur sa jeunesse, rien ne lui fut épargné. Il connut tour à tour l’incurable imbécillité, le mauvais vouloir, la jalousie de son auditoire jacobin, qui ne s’émouvait un peu qu’aux pires fadaises et aux plus veules conceptions de la vie. Il connut les gens qui ne parlent que pour s’écouter et ceux qui n’écoutent que pour vous contredire. Tout cela très vulgaire. Une visite qu’il organisa au Louvre décida de sa démission. Il laissa à d’autres le soin d’élever les masses et de s’en servir surtout. Gérard ne s’adonna plus qu’à l’art seul dont l’aristocratie ahurissait la plèbe.

Une ère nouvelle s’ouvrit. Le clan de ses amis de collège qu’il avait d’abord délaissés pour le milieu