Page:Adelsward-Fersen - Et le feu s’éteignit sur la mer.djvu/216

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À quoi bon, maintenant ? Lui avouer ces cochonneries ? Le faire confident de toute la boue reçue ? Allons donc ! Il fallait se contenir… se contenir… Maleine jetait maintenant avec presque de la joie, mais une joie âpre et sauvage, les débris du portrait dans le seau de sa toilette… Tiens, Muriel ! Un tombeau digne de toi !

Mais la tension des nerfs devenait trop forte. Une rafale le jetait sur son lit. Il pleurait à chaudes larmes et son corps tout entier était secoué de grosses secousses…

— Dites donc ! vous n’avez pas l’air très gai ! Cyrille Miess, presque narquois, débusquait dans la pièce.

D’un coup, comme sous le fouet d’une douche froide, Maleine se dressait, les yeux brûlés ; il les essuyait d’un revers de main, soudain très fier, soudain très mâle : Rien, mon cher, partons ! Puis, indifférent :

— Nannina ! mon chapeau ! Fichons le camp, voulez-vous mon brave Miess ? On ira se promener. D’accord ils partirent, suivis des yeux par la petite bonne qui devinait, elle, le chagrin du padrone. Même, lorsqu’ils eurent tourné la rue et que Nannina fut sûre qu’elle était seule, la petite Capriote à moitié sauvage, la petite vierge aux yeux de gazelle