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très longs qui baignaient les paupières d’ombre bleue, on voyait un fil pâle et laiteux, pareil à quelque fleur d’arum. Gérard n’osa pas la déranger, et la contempla silencieusement. Il récapitulait l’événement. Tout avait bien marché : Muriel semblait plus jolie en mariée qu’en golfeuse ; sa coiffure s’affirmait charmante, avec les glaïeuls sauvages tressés sur le blond argenté de ses cheveux ; sa robe exquise, malgré qu’on eût dit la robe d’une petite fille, mais très « Gibson Girl ».

Maleine évoquait les télégrammes reçus, le : Enfin, vas-y tout de même ! de papa, leur départ de chez elle ; l’étroit escalier de pierre mangé par les géraniums, les œillets et les fleurs de Passion, la procession à travers les ruelles sonores et les sotto portici frais. L’arrivée à l’église où les attendaient un tas de gens avec des fleurs. Dix heures sonnaient, et des pigeons voletaient sur la Piazza. On s’écrasait pour voir Muriel. Les garçons au passage riaient sous cape, faisant des plaisanteries ; et les filles analysaient les dessous et le dessus de la mariée.

Puis, l’entrée avec l’orgue qui attaquait la marche de Lohengrin deux tons trop haut. La messe. L’échange des anneaux. Muriel s’était trompée dans son trouble — car elle était fort émue, — et