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et dans les vignes où des couples grappillaient. Des chansons se succédaient, jolies d’ailleurs, et bien modulées, car tous les chanteurs étaient jeunes, se succédaient avec cette furia de canzonette ou cette sentimentalité de barcarolle qui sont les deux modes de la musique napolitaine.

Au pays, très loin, des paysans attardés dans leurs champs de citronniers ou dans les oliveraies, gémissaient une sorte de litanie profonde comme une mélopée arabe. Leur voix persistait quand les voix du Mont s’étaient tues. Autre part, des couples entraient dans la chapelle, et s’agenouillaient en se baisant aux lèvres, devant l’autel. Ceux-là seraient mariés avant l’année prochaine. Tous en étaient témoin, et aucun rival ne courtiserait la fille choisie. Un groupe fit cercle devant le seuil de l’ermite et soutenus par les grêles pizzicati de deux mandolines et les halètements d’une harmonica, des garçons, le torse nu, admirablement musclés, et des filles, dont on voyait les chevilles robustes, des filles qui avaient aux oreilles de larges cercles d’or et qui riaient haut sous leurs tignasses drues, se mirent à danser, lentement d’abord, puis plus vite, puis dans des vertiges, une sorte de tarentelle échevelée. L’une des danseuses, malgré sa force, tombait, épuisée, râlant de