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sait. Du côté du village de Capri, près du cimetière, lui aussi tout tremblant de flammes, la procession s’effaçait, rampante et grise, constellée par les cierges.

Seuls, dans le calme infini, sans prêter attention à Gérard qui, la main dans la main de Muriel, lui parlait de vagues choses, deux acolytes (sacristains ou congréganistes) chargeaient sur une carriole légère attelée d’un cheval patient et d’un petit bourricot à l’œil rusé, les offrandes de tout à l’heure. Amusée, Muriel les regardait : quand tout eût été nettoyé et fouillé d’un regard précautionneux, les hommes, d’un commun accord, laissèrent une côtelette bien en évidence sur le socle de la Madone, puis, montant sur leur char, dévalèrent vers le presbytère au trot de leur attelage grelottant.

— Quelle différence il y a-t-il entre ces curés et les flamines d’autrefois ? hasardait Gérard ; entre ces offrandes à Marie et les prémisses que, jadis, on réservait à Diane ? ah ! Muriel… C’est bien pour cela que j’aime si passionnément cette Italie ! Quand ils viennent parler de Rome, berceau du christianisme, et ville des papes ; quand ils réclament pour la terre du Dante l’évangélisation du monde, ne voient-ils donc pas, ces faux précurseurs, que rien ici n’est changé du paganisme, et que seule une idole jalouse