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iraient larder quelqu’Université américaine déjà fort en chair.

Malgré cela, Muriel et Gérard vivaient — sans arrière-pensée — leurs plus exquises heures. Tous deux savaient assez les heurts de la vie et les lendemains qu’elle prépare, pour jouir de leur présent bonheur. Ce furent de longues courses folles dès la première aurore, la fraîcheur des sentiers couverts encore de rosée, le vagabondage dans les vignes et dans les myrtes, le repos au fond des grottes ou au bord de la mer. Ils rentraient vers les dix heures, et après la collation légère, travaillaient.

Maleine préparait un grand bas-relief qu’il destinait au salon d’Automne : La souffrance guérie par la beauté. C’étaient, se traînant malgré leur misère, leurs désillusions ou leur débauche, deux processions d’hommes et de femmes (jeunes et vieux mêlés) qui surgissaient du sol esclave pour quêter un sourire illuminé de la Vénus que l’on voyait apparaître — harmonieuse et simple — sur les marches d’un péristyle grec. Déjà les figures se dessinaient, sortant en groupes confus du bloc de marbre dans lequel, à même, il sculptait.

On eût dit une variation de l’œuvre de Bartholomé, mais un thème sur la vie remplaçant le thème sur la mort. Un identique élan, mais conscient,