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LORD LYLLIAN

Puis, à mesure que les soirées les rapprochaient, c’était, petit à petit, des phrases échangées, de menues confidences, où lui percevait autre chose que la griserie des valses. Un sentiment, confus encore, envahissait Renold, sentiment qu’il abandonnait — hélas ! — le lendemain, à l’aurore, pour retourner à ses pernicieuses tentations…

Cependant, dans son cœur, sans que Lyllian se l’avouât, le plaisir d’une rencontre se changeait en émotion, l’émotion en tendresse. Tant et si bien qu’il avait confié son secret à sa cousine, la belle marquise de Rutford ; et la marquise lui avait promis son concours. Ah, il avait beau faire, s’illusionner jusqu’à penser que sa vie désormais l’éloignerait des femmes, mensonge, mensonge, mensonge qu’il se prouvait enfin à lui même !

Tout un être nouveau, dominateur et sensé, germait en lui. Dès qu’il était près d’elle, dès qu’il lui parlait, ses pensées devenaient plus claires et son âme plus pure.

Elle portait en elle tant de grâce et de ferveur, tant de candeur sincère !

Cette jeune fille l’avait sauvé…

Oui, par ce matin clair, limpide comme un cristal, par ce matin clair où il allait, rempli d’une vague espérance, retrouver son rêve, il comprenait délicieusement la joie d’être ressuscité !

Ce fut ainsi, qu’ayant, au milieu de la poussière tourbillonnante, atteint de toute la vitesse de son automobile l’octroi de Versailles, il arriva au rendez-vous.

… Un parc ancien, qui avait dû servir autrefois de retraite à quelque favorite, un parc aux arbres centenaires, savamment taillés comme aux jours jadis, l’accueillit de son ombre et de sa fraîcheur. Encadré d’une