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LORD LYLLIAN

— Peut-être… mais de la haine aussi. Voyez-vous, la haine exalte, encore plus que l’amour. Si vous saviez, continuait le jeune Anglais en chavirant des yeux, si vous saviez comme on m’a vite envié, jalousé, détesté dans le monde !

L’arrière-ban des faux-cols surtout était impitoyable et le demeure encore. « Joli garçon, cette boîte de pickles au teint de fer blanc ! Regardez ces manières, je vous en prie ! D’un efféminé… Et puis c’est authentique, il a toujours une houppette dans sa poche de derrière ; On m’a surnommé « les dames seules » sans penser que sur les chemins de fer, même ailleurs, ça vaut mieux qu’un wagon de bestiaux.

» Hé bien, le croiriez-vous, lorsque j’arrive le soir au bal, ce m’est, by goodness, une volupté que d’apercevoir, entre deux sourires de jeunes filles, le regard rageur d’un vieux de la vieille… Et j’en valse plus légèrement ! Qu’importe, après tout ! La terre est si petite qu’il faut bien marcher les uns sur les autres. Tant pis pour les écrasés !

— Un jour vous regretterez ces pensées, ces paroles. Maintenant, vous êtes heureux, et la veine plus que toute autre rend l’insolence facile et le mépris aisé. Vous êtes jeune et l’on vous aime : Votre légende tient dans ces quelques mots. Mais, hélas ! larmoyait presque Payen, lorsque vous atteindrez mon âge et qu’il vous faudra souffrir sans espérance…

— Je vous vois venir… Vous reprenez le fameux sonnet. Soit, je le discute. Sans parler de vous qui prétendez avoir quelque penchant à mon égard, sommes-nous faits, nous autres, oui ou non, pour servir de cuvette à vos ultimes voluptés ? Non, laissez-moi rire… Je ne suis