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LORD LYLLIAN

Lormar dont la mère était Marie Stuart, je rencontrais ces deux éphèbes de tout à l’heure.

— Un peu de ces gélinottes… Joli, votre endroit !

— Merci ; un bain de mer ! Donc je me rappelle exactement les avoir vus. Ils étaient suivis d’Américains glabres qui derrière eux sonnaient la Diane.

— Mais que de Mercure pour l’avenir !

— Caviar, vous êtes impardonnable. Je les perdis de vue, au reste, la minute d’après — et ce ne fut qu’au souper que je les retrouvai.

— À la Queue, comme vous le dites ?

— Oui et à l’heure du berger. Nous étions sortis tant soit peu écœurés du bal, Chignon et moi. Il n’était qu’une heure. Et ce fut à pied que nous descendîmes les Champs-Élysées et les boulevards.

Le restaurant à notre arrivée était cependant presque comble. Nous avions retenu une table dans un coin. Au premier coup d’œil jeté, je reconnus mes types avec leurs Yankees. Décidément l’hameçon avait mordu. Ils occupaient devant le comptoir une assez grande table où, par néronisme, ils avaient semé des violettes.

Déjà le champagne pétillait, une affreuse limonade à faire frémir ! Ces messieurs, très gais, se donnaient sous la nappe des marques d’intérêt. D’autres tables étaient prises par les jeunes escarpes remarqués jadis et par d’inquiétants invalides du métier. Le patron souriant, avec sa tête à la Henri IV, appelait chacun d’un accent familier. Pas mal l’avaient autrefois payé en nature et de cordiales relations subsistaient entre eux. Nous commandions notre souper problématique, quand le juge Latrouille entra un peu gêné, suivi d’une bande