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LORD LYLLIAN

— Vous me faites payer un peu cher la gargote…

— Sans rancune. Voyons toujours le programme de demain.

— Dîner où il vous plaira. La journée, je vous l’abandonne, my Lord. Avoir affaire avec cette foule qui sent mauvais, des masques piteux, des confettis malpropres. Une odeur de ranci et de cuisinière : Populus Rex ? Fi !

Donc, le dîner, où il vous plaira !

— Bien.

— Vers onze heures, nous allons masqués au bal Wagram. Je vous y promets des réjouissances, nous y ramènerons tout Caprée. Puis nous souperons à la Queue si vous le voulez bien. Ce sera ravissant. Munissez-vous d’un revolver. Et vous serez noté sur les feuilles de la préfecture.

— Entendu, et à demain. Venez avenue d’Iéna vers huit heures. Et pour la première fois depuis mon arrivée à Paris, je me coucherai avec les poules.

Le lendemain je trouve mon Chignon fidèle au rendez-vous. Nous dînons n’importe où et n’importe comment. Chignon, grand seigneur, avait loué un habit.

On va vous prendre en extra pour commander des bocks, insinuai-je. Ses binocles en frémirent. Après un tour jusqu’au Jockey où dans la journée j’avais faussé compagnie à lord Elphinstone et au duc d’Austerlitz nous nous rendîmes à l’avenue de Wagram jusqu’au seuil de la guinguette dont la porte illuminée de gaz éclaboussait violemment la nuit. Nous avions des masques. Une haie de jeunes escarpes et de souteneuses regardait les arrivants et saluait les voitures de maître fort nombreuses et d’ailleurs très discrètement ouvertes.

Nous pénétrâmes après avoir payé nos entrées, vingt