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LORD LYLLIAN

— Pas possible ?

— Je viens de le lire dans le journal. Tenez, voyez vous-même.

Il tendait à Lyllian le dernier « Times ».

— C’est vrai, ma parole, Why, the deuce, didn’t he tell me this ? Why didnt’ he even write ?… Et Lyllian s’étonnait…

— Figurez-vous que je ne m’en doutais pas. J’ai reçu une lettre de lui à Venise, voici trois mois. Il ne me parlait que de prison et de torture. S’il est libre aujourd’hui…

— Cela ne vous fait pas plus de plaisir ?

— Mon Dieu, je suis très content pour lui. Mais j’ai cessé de le fréquenter. Pour des raisons majeures, soit. Tenez, même avant son arrestation, après que nous sommes revenus de Grèce, chacun de notre côté, j’avais refusé de le voir.

— Mais, maintenant… il doit avoir tant souffert…

— Souffert ? parce que c’est un soi-disant cérébral… Ne croyez donc pas ça. Et puis, il est coulé, fini. Vous ne connaissez pas l’Angleterre, vous autres du Continent… Tant que Harold Skilde n’a pas été pincé par le policeman, on le trouvait charmant, spirituel, délicieux. Je l’ai croisé un soir au Savoy, il baisait la main de la duchesse de Sheffield, après avoir fait une entrée sensationnelle entre deux petits amis d’amour.

D’une insolence incomparable, Skilde, je ne le surpasserai jamais. Et puis, des sans-gêne de grand seigneur. On acceptait tout à Londres, par entraînement, par snobisme. Aujourd’hui, il a été arrêté, jugé, condamné… Il pourrait être libéré mille fois. C’est un homme fini !…

C’est un homme fini, répétait lord Lyllian en scan-