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ZYWILA.

détails sa fidélité et sa constance : « Mon prince et seigneur, voici que j’ai taillé ton ennemi en pièces et les dieux te donneront de le détruire entièrement ; je me regarderai comme amplement récompensé si tu ne fais point périr ta fille unique, mais si au contraire tu daignes me l’accorder pour femme ; et en reconnaissance de cette grâce, je te consacrerai mes biens et ma vie. » Le prince, au lieu de lui témoigner de la bonté, laissa percer son mauvais vouloir et répliqua en ces termes : « Poray, tu m’as à la fois rempli de joie et de chagrin ; je me réjouis à l’énumération de tes dignes services, mais tu réclames une récompense qu’il n’est point en mon pouvoir d’accorder. Tu sais que nos saints et grands ancêtres, les princes lithuaniens, ne donnaient point leur fille en mariage à leurs sujets. Malheur à quiconque, sans respect pour son sang, dispose de sa personne à la légère ! Malheur aussi à celui que le succès enorgueillit et auquel il inspire de trop hautes visées ! En laissant de côté ces considérations, ma fille dénaturée a terni l’honneur de ma maison princière. Je me refuse à croire que tu l’aies précipitée dans cette honte. Mais d’où vient ton subit amour pour cette criminelle ? Je ne le comprends pas. Il faut que tu te laves de ce simple soupçon, et je verrai alors ce qu’il me restera à faire. »