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front ; il semblait sortir d’un songe pénible. Il fut quelques instants à se remettre.

La reine le remercia en lui disant bien bas, dans sa langue maternelle :

— Merci, merci, mon bon maître. Oh ! vous êtes bien vengé. Puis le bon Allemand se retira et les grands seigneurs s’inclinèrent quand il passa près d’eux ; la noblesse crut cette fois ne pas déroger en rendant hommage au génie puissant qui venait de se révéler à elle.

Que d’autres scènes, bien autrement intéressantes, nous feraient connaître le vieux clavecin. Comme il nous les raconterait bien mieux que je ne puis le faire, moi, chétif, qui grâce au Ciel, ne suis pas d’âge à avoir vu toutes ces merveilles. Mais j’ai vu le clavecin, et il y a de cela peu de jours, et je dois vous raconter maintenant comment et où j’ai retrouvé ce débris de notre ancienne monarchie.

J’allai dernièrement à l’hôtel des Invalides rendre visite à un ami, un ancien officier supérieur que j’avais perdu de vue depuis longtemps. Après avoir causé de la pluie et du beau temps, matières fort intéressantes pour un invalide, des spectacles que l’on donne l’Odéon, ce qui met en grande joie les paisibles habitants de l’hôtel, nous vînmes à parler musique. Mon ami m’apprit que plusieurs dames musiciennes étaient leurs commensales, et que même quelques officiers pratiquaient cet art avec quelque distinction. Nous avons entr’autres, ajouta-t-il, un de nos camarades qui possède un magnifique clavecin, auquel il