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Eugène Sue et trois autres députés rouges à la chambre. La consternation fut générale ; je me ressentis de cette panique : malgré le succès évident de mon opéra, pas un éditeur ne voulait me l’acheter.

En ne le publiant pas, je perdais la province. Un ami vint à mon secours et me prêta 1,000 fr. Le baron Taylor venait d’organiser une loterie d’un million au bénéfice des artistes ; il fit souscrire pour dix exemplaires au prix de 100 francs chaque, c’était encore 1,000 francs. Le général Cavaignac me fit obtenir une souscription de pareille somme au ministère de l’Intérieur, et avec ces 3,000 francs je pus être moi-même mon éditeur : je ne fis pas un grand bénéfice, mais au moins je pus m’assurer des droits d’auteur en province, ce qui était un allégement pour mes dettes.

Malgré le succès du Toréador, je dus encore attendre plus d’une année avant qu’on consentît à jouer Giralda. Pour occuper mes loisirs, je composai une grand’messe de Sainte-Cécile. Le suffrage des artistes me consola un peu du dédain des directeurs, et même, après la réussite de Giralda, j’en étais venu à un tel point de découragement et je désespérais tellement de finir de payer mes dettes, que j’allai un jour trouver Perrin et que je lui offris de m’acheter pendant dix ou quinze ans pour 6,000 francs par an : je lui aurais fait