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En entrant dans la cour, il aperçut enchaîné dans sa niche, le chien de garde qui avait failli le trahir par son excès de vigilance. Le chien fit un bond de joie en voyant son jeune maître ; celui-ci s’approcha et le caressa du regard et de la main ; puis voyant que la sébile qui contenait sa nourriture était vide : « Ah ! mon pauvre Pataud, lui dit-il, tu as quelquefois des nuits bien agitées, tu as besoin de repos ; sois tranquille, je me charge de t’en procurer ce soir. » Le chien le regardait d’un air intelligent et en remuant la queue : sans comprendre ce qu’on lui disait, il devinait que les paroles qu’on lui adressait étaient bienveillantes, et il suivit du regard son jeune maître s’acheminant vers la cuisine.

— Vraiment, Françoise, dit en entrant Dalayrac à la cuisinière, il n’est pas étonnant que Pataud fasse quelquefois un tel vacarme pendant la nuit : cette pauvre bête est affamée.

— Comment ! monsieur Nicolas, affamée ? mais j’ai rempli son écuelle de pâtée ce matin.

— Et il n’en reste pas une miette, preuve qu’il mourait de faim. Il faut lui donner aujourd’hui double ration, pour qu’il nous laisse tranquilles cette nuit.

— Oh ! dame, je n’ai pas le temps, j’ai mon dîner à soigner. Mais il y a tout ce qu’il faut dans l’armoire, prenez et donnez-lui, si vous voulez.

Dalayrac ne se le fit pas dire deux fois : il fit tremper une forte miche de pain, à laquelle il ajouta un bon morceau de bouilli de la veille ; puis, de crainte