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cantatrices du public. « Tous les dimanches, dit-il, on a, durant les vêpres, des motets à grand chœur et à grand orchestre, composés et dirigés par les plus grands maîtres de l’Italie, exécutés dans des tribunes grillées, uniquement par des filles, dont la plus vieille n’a pas vingt ans. Je n’ai l’idée de rien d’aussi voluptueux, d’aussi touchant que cette musique : les richesses de l’art, le goût exquis des chants, la beauté des voix, la justesse de l’exécution, tout dans ces délicieux concerts, concourt à produire une impression qui n’est assurément pas du bon costume, mais dont je doute qu’aucun cœur d’homme soit à l’abri. » Je ne comprends pas très-bien ce que Rousseau veut exprimer par cette impression qui n’est pas du bon costume : il est présumable qu’il veut dire qu’elle est trop mondaine, car, malgré son admiration si grande pour la musique religieuse, il écrivit plus tard qu’il faudrait absolument proscrire la musique de l’Église.

À son retour en France, il s’occupa de terminer son opéra des Muses galantes. En moins de trois mois, les paroles et la musique furent achevées. Il ne lui restait plus à faire que des accompagnements et du remplissage, c’est ce que nous nommons aujourd’hui orchestration, et cette partie ne devait pas être la moins embarrassante pour un si faible musicien qui n’avait jamais pu déchiffrer une partition. Il eut recours à Philidor ; celui-ci ne s’acquitta qu’à contre-cœur de cette besogne, que l’auteur fut obligé d’achever lui-même.

Cet opéra fut essayé chez M. de la Popelinière.