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corte à un roi qui allait communier. Mais il faut le dire, la physionomie des bourgeois placés derrière eux était tout autre : là, on lisait le contentement. Nous avons toujours admiré Napoléon ; mais à l’époque de sa chute, on ne l’aimait pas, et l’espoir de la paix et de la tranquillité avait fait bien des partisans à son successeur. Qui ne se rappelle avoir vu des mères serrer avec amour leurs enfants contre leur sein, et s’écrier : au moins maintenant nous pourrons mourir avant eux ! La conscription avait bien été rétablie, malgré les promesses imprudentes du comte d’Artois, mais toute chance de guerre paraissait impossible, et le service militaire ne semblait qu’une corvée assez douce, dont on pouvait d’ailleurs s’exempter à prix d’argent, tandis que sous l’Empire les familles après s’être ruinées pour racheter un enfant chéri, l’espoir de leur race, se l’étaient vu enlever comme garde d’honneur, et le voyaient tomber enfin, quoi qu’un peu plus tard, sous le fer ennemi.

Le cortège était arrivé devant l’église, presque entièrement tendue de vieilles tapisseries des Gobelins, représentant la naissance de Vénus, les travaux d’Hercule, ou tout autre sujet mythologique qui contrastait grotesquement avec l’objet de la cérémonie pour laquelle elles avaient été mises au jour. Une espèce de tente était dressée devant le porche de l’église ; la musique de la garde nationale faisait entendre les chants de : Vive Henri IV, Charmante Gabrielle, et Où peut-on être mieux qu’au sein de sa famille, qu’on était alors convenu d’appeler des airs nationaux, comme