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à qui ils ont affaire raccompagnent avec un soin extrême. Notre jeune homme voit l’effet qu’il produit ; il se monte peu à peu, son organe s’étend, reprend toute son énergie, ses moyens semblent s’accroître, il se sent en verve, il met toute la chaleur dont il est susceptible dans la péroraison de son air et quand il l’a achevé, acteurs, directeur, musiciens, chacun le félicite, le complimente ; quand tout à coup, un tonnerre d’applaudissements éclate sans qu’on devine d’où cela peut venir. Chacun se regarde stupéfait : on songe alors aux fenêtres ouvertes, on s’y précipite, et l’on voit la foule réunie qui se donnait les jouissances du spectacle gratis. Le directeur ne craint plus pour ses débuts, il permet à quelques habitués de monter au théâtre. Ce n’est pas sans terreur que notre jeune homme reconnaît parmi eux un de ses joueurs de dominos qui, en entrant, demande avec empressement qui vient de chanter ainsi. On lui montre notre pauvre artiste tout tremblant devant celui qui s’était si bien promis d’être sévère envers les débutants.

— Comment, s’écrie-t-il, c’est Longino !

— Allons ! encore Longino, dit notre artiste désespéré ; mais il se sent entraîné vers la fenêtre par celui qu’il prend encore pour son ennemi.

— Mes amis, dit ce dernier, en le montrant à la foule réunie au-dessous d’eux, voilà celui que vous venez d’entendre, c’est Longino, celui que nous avons pris pour le trial.

— Bravo, Longino ! s’écrient les cent voix du parterre en pleine rue.