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d’accepter des rôles, et lui, toujours bon garçon, ne se donnait pas d’importance, comme font d’ordinaire les acteurs à succès ; il était toujours modeste et affable avec tout le monde, et au lieu d’avoir l’air de faire une grâce à ceux qui lui confiaient des rôles, il remerciait les auteurs dont il faisait réussir les ouvrages. Le public se pressait en foule au théâtre quand il devait chanter ; les applaudissements éclataient de toutes parts ; les couronnes et les bouquets pleuvaient sur sa tête ; on le redemandait après la pièce, mais sous son véritable nom, et non plus sous cette odieuse dénomination de Longino. Ce rêve lui avait rafraîchi le sang ; quand il s’éveilla, il faisait grand jour : c’était une belle matinée du mois de mai ; le soleil dardait ses rayons à travers les croisées, et venait frapper sur le petit lit de la jolie enfant, qui ne tarda pas non plus à s’éveiller.

Il faut ne pas connaître un cœur d’artiste pour croire que le découragement puisse être de longue durée chez lui : un rien peut l’abattre, mais un rien le relève. Aussi notre jeune homme ne songeait-il plus le moins du monde à son voyage de Paris : au contraire, l’avenir le plus riant se présentait à lui ; et c’est le cœur content, et rempli d’espoir, qu’il se rendit au théâtre.

L’orchestre était réuni depuis longtemps et essayait en vain depuis une heure de mettre ensemble l’ouverture du Chaperon que l’on devait jouer le lendemain. Les instruments à vent ne pouvaient faire exactement leurs rentrées. Le chef d’orchestre avait perdu