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répétitions ; car plusieurs fois il avait rencontré dans son chemin quelques-uns des jeunes gens qu’il avait déjà vus au café, et jamais ceux-ci ne manquaient de rire du plus loin qu’ils l’apercevaient, et le nom terrible de Longino venait résonner à ses oreilles : c’était comme un cauchemar qui le poursuivait tout éveillé, et lui ôtait tous ses moyens. Quand il arrivait au théâtre après de telles rencontres, il était tout démoralisé ; c’est à peine s’il pouvait chanter : il avait perdu son aplomb ; ses nouveaux camarades l’intimidaient. Sont-ils heureux, pensait-il, de ne pas être grands comme moi ! j’aimerais mieux être un nain, je mettrais des talons, et je porterais une coiffure d’un pied de haut, mais le moyen de se rapetisser ! ! !

Les répétitions allaient toujours leur train, mais le directeur ne paraissait pas enchanté de ses nouvelles acquisitions : il craignait que les débuts ne fussent pas heureux, et pour que le public ne prît pas de préventions défavorables, il décida que personne, amateur ou abonné, ne serait admis aux répétitions. Le grand jour, celui de l’ouverture, fut enfin fixé. La grande répétition, celle avec l’orchestre, devait avoir lieu la veille.

La nuit précédente, notre jeune artiste eut un sommeil fort agité. Les songes les plus bizarres le tourmentèrent une partie de la nuit, il rêvait qu’il débutait, mais ce n’était plus dans son emploi de Martin, c’était dans celui des trials, où, à son entrée, sa longue taille excitait des rires unanimes ; puis, quand il voulait parler, il ne pouvait dire un mot de son rôle ; il se