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qui vous possède à l’approche d’un grand danger, succède tout d’un coup cette courageuse résignation qu’on éprouve quand le danger est venu. Il n’y avait plus moyen de l’éviter ; je pris le parti de rire de mon malheur, et de jouer le rôle d’observateur, pour pouvoir au moins tenir mes concitoyens en garde contre une pareille infortune. La première pièce où nous entrâmes n’avait rien de particulier ; mais la seconde était fort remarquable : au milieu était un piano couvert de partitions et de parties d’orchestre ; des pupitres étaient disposés tout autour, et contre les murs étaient appendus toutes sortes d’instruments des plus aigus aux plus graves. Une douzaine d’individus étaient déjà réunis dans cette salle. À notre entrée, ce furent des acclamations unanimes : Ah ! c’est M. Vincent ; bonjour donc, monsieur Vincent ; quel plaisir de vous voir, etc. Les poignées de mains et les félicitations venaient de toutes parts à mon compagnon qui ne savait auquel entendre.

Après toutes ces politesses sur l’assurance que le concert ne commencerait pas avant une heure, j’entraînai mon ami Vincent dans un petit coin, et voici les détails qu’il me donna sur l’assemblée où nous étions :

— Cette réunion a plus de trente années d’existence. C’est un fonds qui s’achète et se trafique comme tout autre genre de commerce. Ici, pour 5 fr. par mois tout amateur, de quelque instrument qu’il joue, peut venir une fois par semaine faire la partie dans les ouvertures et symphonies qu’on exécute. On fournit