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celui qui est mort sera dans la terre, parce que je me croirais trop abandonnée.

Mes amis sont d’une bonté si grande pour moi que ma douleur en est comme endormie. Pelletan, Henri Martin, Legouvé, Charton, Jourdan, viennent et pleurent, eux aussi, l’ami incomparable qui les a quittés, qu’ils aimaient, depuis bien plus longtemps que moi encore.

Mme  d’Agoult, de Ronchaud, Mme  de Pierreclos, Toussenel, Hetzel, Bixio, Edmond Adam, mes cousins Vilbort, s’entendent pour ne pas me laisser seule. Je voudrais être auprès de Mme  Jean Reynaud, mais elle m’a dit que je lui faisais mal parce que je n’ai pas assez de foi en l’âme vivante de mon « papa ».

« Je le vois devant mes yeux, me répète-t-elle, il me parle, il me conseille, il est présent. Tant de bonté, tant de noblesse de cœur, tant de beauté morale, sont immortelles, et je veux vivre unie à la nouvelle forme de la vie de mon Jean comme à l’ancienne, pour l’honorer et le faire honorer. »

Mon père et Arlès-Dufour sont là. Leur tendresse adoucit ma peine, mais la pensée qu’un jour, moi vivante, je les verrai, eux aussi, me quitter tout à coup, augmente mon chagrin.

Après l’enterrement de Jean Reynaud, mon père m’emmène à Chauny, et je promets à mon ami Arlès-Dufour d’aller passer la fin de septembre à Oullins, car sitôt octobre, je retourne à Bruyères, avec ma fille, le terminer, pour y