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Port quelques semaines chaque année. L’une des voisines de campagne de Legouvé était une jeune veuve un peu mystique, résolue à ne jamais se remarier. Elle et Jean Reynaud, tous deux voyageant au ciel, s’y rencontrèrent.

Nulle plus que Mme Jean Reynaud n’eut en haute compréhension le rôle d’épouse. Il y a d’elle des mots superbes. Jean Reynaud, qui s’était séparé du saint-simonisme parce qu’il touchait aux respectabilités de la famille, avait lui-même le culte des joies intimes et du devoir dans un mariage de choix.

Hetzel et Bixio m’écrivent tous deux qu’ils ont « monté la tête à Mérimée sur moi » et que je dois m’attendre à le voir arriver en mon logis. Que dira Jean Reynaud, s’il vient ? Bixio est l’ami le plus intime de Mérimée, qui l’a fait, dit-on, son légataire universel. « Bixio est indestructible, » répète sans cesse Mérimée, à ce que m’a plusieurs fois raconté Hetzel, « la mort avait une superbe occasion de le prendre en 1848 et elle n’en a pas voulu ; il nous enterrera tous. »

Malgré ce qu’en pensaient Hetzel et Bixio, je tenais Mérimée pour un poseur, froid, sarcastique, sceptique ; c’était ainsi que généralement on le dépeignait, et j’en avais un peu peur.

Nous demeurions, Mérimée et moi, chacun