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la formation ou la déformation de l’esprit théâtral, parce qu’il ne cherchera pas, comme tant d’entre nous, trente-six mille petites bêtes. C’est un doux qui n’oblige pas ses adversaires à se cabrer, mais c’est un tenace. Tandis que les autres caracoleront à la chasse des envolées de l’esprit, il fera calmement et sûrement le chemin qu’il voudra faire.

— Tu as un moyen sûr d’obliger mon sort à réaliser tes prédictions, repartit Sarcey, c’est de lui continuer tes coups d’épaule. »

Sarcey, malgré nos sourires, défendait Scribe, affirmant que nul n’a mieux compris le théâtre en tant que théâtre. Il adorait Emile Augier et vous déclarait, avec une logique irrésistible, qu’ « il n’avait pas de rival, pour ne courir après rien autre que le théâtre ».

Le Chapeau de paille d’Italie, analysé par Sarcey, devenait un chef-d’œuvre. Marivaux lui plaisait comme charmeur et maître en l’art du joliment dire. Il était fanatique de Corneille, le sachant par cœur en entier et ne manquant jamais une représentation classique, depuis qu’il habitait Paris.

« Les critiques comme les acteurs ne se forment que dans le répertoire, » disait Sarcey.

Il osait convenir, malgré les injures d’About, qu’il ne comprenait pas Shakespeare. Pour Sarcey, encore, malgré nos quatre bruyantes protestations, Musset était un fantaisiste dont le théâtre détournait les spectateurs du théâtre.