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monies pour pénétrer dans l’antre du lion. Après avoir parlé de vous et de votre lettre, nous sommes tombés naturellement sur son livre qui va paraître dans quelques jours. « Il fera, m’a-t-il dit, trembler l’Europe. » Franchement, ce mot m’a paru bien naïf pour un vieil homme de lettres. Il ne devrait y avoir que les jeunes gens pour croire qu’un livre peut produire de tels effets. Il est clair que Proudhon est heureux de faire peur et qu’il serait bien déçu s’il n’y parvenait pas. J’ai cru le rassurer en lui disant qu’il avait « ses immunités ». Ce mot innocent l’a presque mis hors des gonds. Il m’a répondu avec une vivacité qui frisait l’emportement, et en termes où j’ai reconnu qu’il n’était pas fait pour la discussion courtoise.

« J’en ai conclu que la tolérance accordée à la Révolution démontrée par le coup d’État était un souvenir qu’il n’aimait pas qu’on lui rappelât.

« Cordialement à vous.

« Challemel-Lacour. »

On vit aussi chez Mme  d’Agoult, Mlle  Clémence Royer, qui s’était exilée volontairement pour suivre Pascal Duprat. Elle avait ouvert ses Cours de philosophie à Lausanne. Sa première leçon : Introduction à la Philosophie, eut un succès retentissant. Les plus doctes maîtres suisses en cette science la proclamèrent digne à son tour de la maîtrise.